Meyerbeer ? Les Huguenots ? Metz, juin 2006

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cherubeer
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Message par cherubeer » 11 juin 2004, 19:30

[quote="Lyricomaniaque]

Oui : mon gloussement était intérieur, je ne suis pas comme ça. D'ailleurs j'applaudis toujours chaudement un spectacle même si je ne l'ai pas aimé pas pure politesse.

Je ne parle pas assez des chanteurs , certes c'est vrai, mais non pas parce qu'ils sont secondaires pour moi ( Je dis même que la mise en scène ne doit pas entrer en concurrence avec les chanteurs, et qu'il faut avant tout aller voir les huguenots pour les voix : t'es sûr que tu m'as lu jusqu'au bout ?????).

Malheureusement, je suis totalement incapable d'en dire plus car je n'y connaît rien , je n'ai pas l'oreille affutée comme toi et je ne suis qu'un instit, je n'ai jamais étudié la musique ou les voix !!!! C'est juste du ressenti, point ! Maintenant ,je compte bien dévorer des livres sur le sujet pour combler mes lacunes.Si tu veux m'en conseiller, n'hésites pas !


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tristan
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Message par tristan » 11 juin 2004, 20:12

Merci pour vos critiques sur les HUGUENOTS;j' y serai demain soir et pour moi, c' est un moment extrêmement attendu.....depuis des mois.Dans un emploi du temps fort chargé,j' y vais dans un "esprit"bon public":j' ai écouté l' ouvrage dans 3 versions différentes depuis plusieurs mois, et parfois partition en main.C' est un ouvrage d' une difficulté réelle et depuis THILL, FRANZ, MEDUS......DUPREZ dont on peut rêver, a-t-on les 7 "DIVE"pour défendre l'ouvrage?
et nous sommes bien contents de l' entendre, en dépit des petites réserves que l' on peut émettre!!!!
Quel dommage que DALE ne puisse poursuivre une politique de programmation aussi intéressante et riche!!!!

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lyricomaniaque
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Message par lyricomaniaque » 12 juin 2004, 08:11

Pour répondre à Xavier (un peu tard, désolé...), il y a bien le passage intermédiaire entre "beauté divine" et "ah, si j'étais coquette", avec une longue cadence-vocalise à deux - très réussie le jour de la première !

Urbain est chanté par un soprano... mais c'est déjà le cas dans l'intégrale Martina Franca avec Allegretta... qui chante quand même "non, non..." ! Ce rondo n'est pas écrit très très bas - en dehors de quelques notes qui lui posent problème, c'est vrai...

Par parenthèse, une maison d'édition vient de publier à 12 euros un récital de Horne dirigé (oui!oui!)par Martin Katz avec des extraits d'Alceste, Orphée, Italiana, etc... et le "non, non" des "Huguenots" : Hornien en diable ! Je recommande aux amateurs !

Autres remarques pour Cherubeer : 1) instituteur est un merveilleux métier (que j'apprécie de lire ce mot plutôt que "prof des écoles" : ri-di-ule !) 2) amateur est un mot noble 3) dire en conclusion de ton papier "allez entendre surtout pour les voix" n'enlève rien à la disproportion de ton billet 4) tu pouvais tout autant développer tes émotions ou tes sensations sur les chanteurs que sur la mise en scène, me semble-t-il 5) les forums ne sont pas, dieu merci, réservé qu'aux musicologues

Tout ceci pour dire que nous pouvons signer l'Armistice... mais encore un mot désagréable sur Blake et je m'attaque à la Méduse ! :wink:

nb : au fait, que t'ai-je fait personnellement pour que tu m'évites à Metz ??? :cry:

nb2 : Une belle soirée à tous les ODBtiens qui se meyerbeerisent ce soir ! Jouissez de pouvoir entendre cette oeuvre comme jadis, où toute scène de province le distribuait régulièrement... un peu exagéré, mais pas très loin de la vérité...

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Pfffffffffffffffff.........

Message par cherubeer » 12 juin 2004, 11:55

J'évite tout le monde ! J'suis un ours solitaire, je vis dans les contrées hostiles de la Meuse (même si mon coeur et ma famille sont à Metz) et j'ai encore une vilaine remarque à faire sur Rocky : sa voix semble ne pas porter comme les autres (pourtant il a un vibrato !). On dirait qu'il est 100 m plus loin. Quel curieux phénomène !

Maintenant, tu peux avaler ta soupe à la Méduse. Miam ! :wink:

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Message par richie3774 » 13 juin 2004, 04:59

Une grande soirée à Metz. :clapping: :clap: :happy: :thumbup:
Comme promis à mes sympathiques voisins, voici mon compte-rendu en primeur de cette soirée du 12 au théâtre de Metz.
Désireux de découvrir enfin le grrrand opéra, genre délaissé, je me suis donc rendu samedi à Metz, long voyage, mais si c'était à refaire demain, je serais partant.
N'ayant jamais entendu ni Die Hugenotten, ni gli Ugonotti ni même les Décembristes, j'ai pu aborder cette oeuvre avec des oreilles neuves, mon seul à priori étant que ça serait long, et eput-être assommant.
Eh bien ce fut trop court, les 5 actes sont passés à toute vitesse, sans tunnels, sans ennui .
Scribe a fait un livret remarquable, plein de scènes puissament théâtrales, les personnages ont une vraie épaisseur psychologique, ils ont attachants et profondément humains. Et ce qui ne gâche rien, il a évité le manichéisme, la fin du III est très révélatrice, Huguenots et Catholiques se renvoient la balle comme des enfants pris en faute. Seul critique, il y a quand même un tout petit peu trop de serments grandiloquents.

La musique est d'une inventivité tout à fait exceptionnelle, l'orchestration est d'une subtilité rare, on a droit à des airs avec accompagnement de violon ou de clarinette seule, avec cors, harpes, trombones. les trompettes s'en donnent à coeur joie, un régal pour amateur d'orchestre.
La musique n'est pas celle d'un faiseur, mais d'un authentique génie, et je trouve criminel que cette oeuvre ne soit pas jouée plus souvent dans tous les théatres. Il est vrai que cet opéra est d'une difficulté extrème, pour les instrumentistes comme pour les chanteurs, mais il a tout pour redevenir une pièce du répertoire. Il suffit de le produire, si Metz et Liège le font, avec leurs petits moyens, Paris et Bruxelles doivent le monter aussi, il n'y a vraiment aucune raison de ne pas le faire, à part le snobisme et le mépris des petits marquis.

La mise en scène et les décors

Laurence Dale a réussi à donner cohérence et unité à cette pièce, dont on sent qu'elle pourrait partir dans tous les sens sans une vision bien structurée de l'oeuvre.
beaucoup de belles images, le ruisseau de sang, les noces funèbres, la rencontre Valentine Marcel dans le III, le final du II,...
Quelques points négatifs
- au II, la pièce d'eau ressemble plus à un bassin d'orage qu'à un charmant ruisseau tourangeau
-au II encore quand Raoul arrive, un puissant phare éblouit les spectateurs, est ce qu'il descend de moto?
- la scène du duel au III est difficile à comprendre, qui fait quoi?, comment distinguer les huguenots des papistes?, il aurait été préférable d'habiller les huguenots de noir, la scène aurait été plus lisible
- la scène de débauche du I, franchement 3 filles pour une trentaine d'hommes, c'est pas beaucoup, ça tient plus de la troisième mi-temps d'une équipe de rugby en tournée que de l'orgie. Je comprends pourquoi Nevers donne du "beau page" à Urbain, la chair est rare.
- le gugusse avec son M16 en plastique,:gunsmilie: pas besoin de ça, on avait compris le message.
- les décors du I et II sont un peu tristounets à mon goût
Ces petites critiques sont vraiment peu de choses par rapport à l'intelligence de cette mise en scène, de tout petits détails qui ne sont pas vraiment gênants.

La distribution.

De très haut niveau, mais tout le monde a des hauts et des bas suivant les actes, sauf le trop court rôle du page chanté par Hjôrdis Thebault, rayon de soleil du I, alors que les autres y sont un peu poussifs. Voix puissante, souple et claire, les aigus sont rayonnants, le timbre est subtil, elle triomphe de l'orchestre et des choeurs masculins qui l'accompagnent sans l'ombre d'une difficulté.

Philippe Kahn (Marcel), chevrotant dans le I, où la chanson de La Rochelle le met en grande difficulté, il se reprend dans les trois derniers actes, avec un chant d'une grande noblesse, une diction superlative, et une émotion très touchante dans le duo avec Valentine. Il recevra à la fin une ovation cent fois méritée.

Ivan Ludlow (Nevers), lui aussi s'améliore durant la représentation, mal à l'aise au début du I, avec une diction très approximative et un accent très peu idiomatique, la suite nous donne un français presque parfait, une qualité d'intonation étonnante, il creuse son personnage avec beaucoup de finesse. Sa mort, racontée par Valentine, en sauvant Marcel de ses coreligionnaires, n'en est que plus convaincante.
Question aux spécialistes: Est ce que cette scène existe dans l'original?

Jean Philippe Marlière (Saint Bris)
Pas grand chose a dire sur lui, le rôle est court et peu marquant, mais il le défend avec beaucoup de probité, malgré une voix pas très séduisante.

Alketa Cela (Valentine), cas tout à fait spécial, sa voix m'a semblé être celle d'un mezzo au II et dans le début du III, avec des graves d'une grande beauté, et subitement je l'ai découverte soprano aux aigus triomphants dans le duo avec Marcel et la suite. Son français est excellent, sauf le court récitatif au début du IV, sinon aucune trace d'accent.
Je l'ai trouvée splendide de bout en bout, excellente actrice en plus. Avec Urbain, c'est mon deuxième coup de coeur de la soirée.

Sally Silver (Marguerite), chant très séduisant lui aussi, un timbre un rien trop opulent à mon goût. Elle chante un français très correct, mais les récitaitfs révèlent un accent assez gênant. Son chant ne me fait pas penser à une reine , mais plutôt à une courtisane de haut vol, genre Schéhérazade.

Abordons maitenant le cas Rockwell Blake (Raoul)

Son air du I fut une longue souffrance pour les oreilles, mais il en triomphe avec un brio extraordinaire, voilà à quoi sert une technique sans faille.
Le timbre est maigre et pas des plus séduisants, son français est approximatif, il a eu deux ou trois trois de mémoire (tout petits), il a produit un nombre incalculable de très vilains sons ,sur les mots en aigne notamment, ses récitatifs et dialogues le mettent en difficulté, mais qulle classe, quel souffle, il tient je ne sais quel note en traversant la scène comme si de rien n'était, il en remontre à des sopranos de 20 ans ses cadettes, sans jamais faiblir. Comment triompher d'une voix devenue ingrate en 5 leçons. les duos, les ensembles le montrent à son meilleur, il est sans égal dans ces moments-là.
Quelques spectateurs l'ont pris à partie à la fin de son premier air, d'une façon tout à fait véhémente, mais les supporters de Rocky les ont largement battus. Il y avait notamment un couple d'allemands assis à deux sièges de moi, qui l'ont même conspué à la fin du spectacle. Ambiance de corrida.

Les comprimarii étaient fort honorables, sauf peut-être De Cossé, assez cacochyme.
A propos, des semelles antidérapantes ne seraient pas de trop, Julien Neyer a failli se fêler le coccyx et briser le cou d'une choriste dans sa chute.
Choeurs très corrects, mais incompréhensbles.
belle prestation de l'orchestre, mention spéciale pour le clarinettiste solo et les pupitres de cuivre.
Je ne peux rien dire sur jeremy Silver, n'ayant aucun point de comparaison, mais je ne l'ai pas trouvé ennuyeux une seule seconde.

Mon sympathique voisin m'a dit que le metteur en scène avait simplifié la fin de l'ouvrage. Dans quelle mesure?

Tout le monde a été ovationné par un public en délire pendant de très longue minutes, et surtout le grand Laurence Dale, qui le méritait plus que tout autre.

Reste à aborder le gros point noir de la soirée, l'absence de buvette.
Le bar est en travaux, d'accord, mais est-il si difficile d'installer une table, quelques bacs de bière, et deux cartons de jus d'orange? Il faisait une chaleur de tous les diables dans cette petite salle, est ce qu'ils ont trop d'argent à Metz pour pouvoir se passer des revenus d'une cafétéria?

En conclusion, on avait chaud, on avait soif, on transpirait, mais on a applaudi à tout rompre un merveilleux spectacle.
Et surtout :director: allez voter!

Richard
Excusez moi d'être un peu long, mais je suis sous le coup de la découverte. :Jumpy:

P.S. A monsieur le maire de Metz: le public était composé ce soir d'un grand nombres d'étrangers, qui ont visité votre ville, mangé dans vos restaurants, dormi dans vos hôtels, ils ne votent pas pour vous bien sûr, mais il m'étonnerait fort qu'ils fassent le déplacement pour entendre Tosca.

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Catherine
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Message par Catherine » 14 juin 2004, 09:38

Déplacement massif d'Odébiens ce week-end pour la dernière des Huguenots et la première de l'Africaine (j'y reviendrai dans un autre fil de discussion). Le parvis des opéras de Strasbourg et Metz avant les représentations et aux entractes tenait de la chouquetterie !

J'ai donc vu ces Huguenots auxquels je révais depuis presque un an. Et, je le dis en préambule, même quelques remarques aigre-douces ne pourraient gâcher un tel bonheur.

Remarques aigre-douces ? oui, je n'ai pas aimé la mise en scène. Les catholiques sont montrés comme des soudards débauchés qui violent des prostitués sur des tables de cuisine et pataugent avec leurs bottes dans le bassin de Marguerite de Valois. Or, ce sont des nobles de la cour de Charles IX, pas des reitres ! d'ailleurs, la noblesse de Nevers se dévoile dans "frappons nos ennemis, mais non pas sans défense". On me rétorquera que ce joli monde a participé à un des plus grand massacre de notre histoire, et que le Henri de Valois de la Reine Margot de Patrice Chéreau n'était pas beaucoup plus distingué. Et c'est pour ces références au film que j'absous Laurence Dale. Valentine au dernier acte avait exactement la même robe tachée de sang et la même coiffure qu'Isabelle Adjani, sauf que la reine Margot, ce n'est pas elle, bien sûr, c'est l'autre, la dinde sans noblesse qui se trémousse sur les ballets. A propos de ballets, tant qu'à couper la première partie du 5ème acte, pourquoi ne pas la supprimer définitivement au lieu de nous infliger ce grotesque numéro de claquettes ?

Enfin, bref, la vision de Laurence Dale se défend, mais ce ne sont pas "mes" Huguenots, et nous en revenons à une discussion précédente avec JdeB : on est beaucoup plus intransigeants avec les oeuvres qu'on aime.

J'ai parlé de coupures : celle du 5ème acte, traditionnelle, nous privant du 2ème air de Raoul, le bruit court que c'était un problème de matériel d'orchestre manquant. Et puis, plus génant, le début du 3ème acte : on commence sur la prière, puis un morceau du rataplan, mais ensuite, ces 2 morceaux doivent se superposer et ceci a aussi été coupé, si bien qu'on a l'impression que l'acte commence dans une atmosphère de recueillement (vierge Marie...) alors qu'il décrit au contraire l'atmosphère tendue de ce début de journée de la Saint Barthélémy et l'explosion toute proche...mais la suite de l'acte était intégrale, avec tout le duo Marcel/Valentine, si souvent tronqué et charcuté, et la perte de l'un valait bien le gain de l'autre...

Une dernière petite coupure, la dernière intervention de Valentine, pas très génante, je l'ai toujours trouvée hors propos.

A coté de ça, nous avons eu droit à l'intégralité du reste, c'est à dire de scènes habituellement coupées, et donc très rarement entendues "preux doit vivre pour sa belle" ou la 2ème strophe de la blanche hermine, par exemple. Et pour cette joie, j'absous de nouveau M. Dale des coupures de parties plus connues.

J'ai trouvé la direction d'orchestre très lente, mais les instruments très justes : ainsi l'alto de la blanche hermine était parfait.

Lyricomaniaque a tout dit sur Rocky : sa blanche hermine anthologique, sa messa di voce phénoménale sur "ah viens". Un Raoul au timbre certes laid et usé, mais unique.

Le reste de la distribution est forcément moins exaltante, mais tout à fait honnète. Oserais-je dire qu'Alketa Cehla possède le physique de Valentine, le timbre de Valentine, les graves de Valentine, mais que malheureusement, elle ne chante pas juste ? Ca gâche un peu la fête...

Je laisse la parole aux suivants pour compléter mon propos. L'Africaine dans la journée.

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Message par Jef » 14 juin 2004, 11:34

Et bien Catherine, je suis un peu déçu, j'ai croisé Xavier, jb, Placido mais pas toi.
Comme toi, la mise en scène du 1er acte ne m'a pas emballé. C'est vrai, ce sont des personnages de la cour de Charles IX. Le film de Chéreau n'est pas non plus un film historique. Et ces bottes?
Personne n'a remarqué les adorables petits manteaux en tulle que l'on auraient dit échappé de la panoplie d'Andora, la mère de ma sorcière adorée.
J'ai passé une excellente soirée et je remercie Dale d'avoir fait ces choix mais pas la mairie de Metz. :evil:

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Catherine
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Message par Catherine » 14 juin 2004, 12:07

Désolée Jef, j'ai moi aussi croisé Yonel, Camille...et pas toi !

Oui, les manteaux de tulle d'Andora, c'est tout à fait ça ! :clapping:

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Xavier
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Message par Xavier » 14 juin 2004, 15:44

C?est une stratégie commerciale très intéressante pour un petit opéra de province que de programmer une ?uvre comme Les Huguenots. A l?hôtel, au café ou dans les restaurants, un public de plusieurs centaines de touristes lyriques hantaient une ville de Metz qui, pour n?être pas vilaine, n?est pas une destination incontournable. Samedi, devant le théâtre, trois bus dont deux allemands, déversaient des flots de meyerbeerophiles. Pour un théâtre de 800 places, c?est pas mal.

Sans être celle du stade de la Luz, l?ambiance était donc très bonne ce samedi là entre les bras de la Meuse. Car si un ou deux belges venaient exprès entendre les derniers feux de Rockwell Blake, c?est bien Meyerbeer qui attirait une foule cosmopolite d?Américains, Canadiens, Allemands, Italiens, Suédois (au moine un !), et j?en passe. L?appréciation du résultat final était donc biaisé par la joie d?entendre et de voir enfin cet opéra, comme d?ailleurs par la conscience des moyens limités mis en ?uvre.

A l?aune de ces critères, Les Huguenots de Metz ont été un vrai succès, une grande réussite. Malgré tout, dans un contexte différent quelques détails ou prestations auraient mérité de plus franches critiques.

La production tout d?abord. Nonobstant des moyens techniques limités et des ressources réduites, le dispositif scénique était ingénieux et j?ai trouvé le décor et les costumes plutôt esthétiques. Un jeu de panneaux agrandissait ou réduisait en effet la perspective scénique, permettant de créer des espaces différents pour chaque acte, évitant ainsi la monotonie du décor unique. En revanche, je souscris aux propos de Catherine au sujet des nobles catholiques. Pour le coup, ils n?auraient pas dépareillé avec une croix de St James à Lisbonne ! A certains moment, leurs rires, cris et bousculades ainsi que leur propension à jouer avec leurs épées m?ont beaucoup agacé car ils finissaient par déranger ou couvrir la musique.

Cette impression était d?autant plus forte que rares étaient les coupures dont on afflige souvent le premier acte dans lequel ils s?ébrouent. C?était d?ailleurs une constante de cette soirée : on pouvait compter les coupures sur le doigt d?une seule main ! Quand on connaît les charcutages dont ont été victimes toutes les représentations des Huguenots au XXième siècle, on ne peut que s?en réjouir.

Ainsi, outre le rondo d?Urbain, qui est un air alternatif, on n?a en effet uniquement eu à déplorer l?absence du deuxième air de Raoul (je ne crois pas une seconde à cette histoire de matériel orchestral !), la scène de foule et le ballet du troisième acte (peut-être pour des questions de nombre de choristes et figurants ?) et les dernières phrases de l?opéra échangées entre Valentine mourante et son père. Soit dit en passant, c?était une manie ce week-end ! Dans L?Africaine on avait aussi coupé les dernières phrases entre Selika et Nelusko En revanche, tout le reste nous était donné sans coupure, ce qui, à ma connaissance, constitue une première sur scène.

Par ailleurs, la partition orchestrale était très bien jouée, ce qui, venant de la part de l?orchestre de l?opéra de Metz et après une expérience mitigée en la matière avec Gustave III, a été une des bonnes surprises de la soirée. Comme le souligne Catherine, l?alto qui accompagne Plus blanche que la blanche hermine, et singulièrement son récitatif, était parfait. Ca n?a l?air de rien, mais si on en juge par les témoignages lives, c?est très rare. Par ailleurs, le chef, Jeremy Silver (et pas Baldo Podic comme annoncé au départ), a évité les décalages et su donner aux finales, notamment celui du II, toute la grandiloquence propre à ce genre. Le mérite en était d?autant plus grand que les ch?urs, surtout masculins n?étaient pas irréprochables. C?est d?ailleurs ce qui ne me fait regretter que mollement la coupure dans la première scène du troisième acte.

Avec tout ça j?ai mauvaise grâce à me plaindre de la direction même si je l?ai trouvée encore plus lente que celle de Cyril Diederich (c?est dire !).

Les interprètes maintenant (haaaaa !). Avec ces Huguenots messins, Rockwell Blake est rentré dans le club très fermé des chanteurs internationaux ayant interprété deux rôles de Meyerbeer sur scène. Cependant, à bien des égards, son Raoul est bien loin de son Robert d?il y a presque 20 ans. On a beaucoup glosé sur le timbre de ce chanteur. A mon avis, il n?était dans sa prime jeunesse pas aussi vilain qu?on l?a dit. Aujourd?hui il ne l?est pas plus pour la simple et bonne raison qu?il n?en a plus. On entend des accents des inflexions de Blake, des prononciations de Blake, un style alla Blake, des notes qui ne sont qu?à lui, mais une voix? Dans des morceaux ornés comme Beauté divine enchanteresse ça ne pose pas trop de problème, mais dans d?autres, comme notamment les parties déclamatoires du Grand duo du IV (Où je vais ? Secourir mes frères etc.), j?ai trouvé qu?on entendait très clairement les trucages faits pour passer la rampe. Il en allait de même pour sa cavatine d?entrée. Oui, c?était époustouflant de maîtrise technique : il ne respira jamais, chanta la moitié des phrases pianissimo et attaqua les aigu piano, les enflant puis les réduisant (NB : C?est ce que j?appelle un "truc" :il a fait ça pour tous les aigus tenus, ré bémol de Ah viens ! compris). Mais peut-il faire autre chose ? Est-il encore capable de chanter une phrase un peu dramatique à pleine voix ? Pas sûr.

Mais, quelles que soient mes réserves esthétiques et un léger sentiment que le métier ne fait pas tout, Rockwell Blake réussit l?exploit de chanter toutes les notes de Raoul avec une certaine probité. Même si ça n?est pas toujours "joli", ça mérite le respect.

Face à lui, la Valentine d?Alketa Cela a été mon coup de c?ur du week-end. Dès son entrée au deuxième acte et surtout sa participation au final de celui-ci, j?ai été conquis. Sur scène, face à un Raoul ressemblant un peu à Leslie Nielsen dans un film des frères Zucker, j?ai cru voir Cornelie Falcon ! Grande, mince, aux cheveux noirs de jais avec un teint blanc elle respirait noblesse et fragilité. Quand elle a ouvert la bouche j?y encore plus cru ! C?était pour moi exactement la voix que j?espérais dans ce rôle : celle d?un vrai soprano à la voix ample, chaude, percutante aux graves et aux aigus homogènes. Comble de bonheur, c?est elle qui a assuré l?aigu conclusif du deuxième acte, Sally Silver, qui chantait Marguerite, l?ayant lâché aussi vite qu?elle l?avait (mal) attrapé.

A l?acte III, le duo entre Marcel et Valentine aurait été un moment d?émotion et de bonheur absolu, si Alketa Cela n?avait, comme l?a fait remarquer Catherine, chanté faux la plus part de ses aigus. Une incidente en passant : certes, ses aigus étaient un peu faux, mais elle, elle les faisait, ce qui d?Enriquetta Tarres à Françoise Pollet en passant par Raspagliosi, n?est pas le cas de tout le monde. A l?acte IV, son air, sa participation à la Bénédiction des poignards et son Grand duo avec Raoul étaient très réussit. Enfin, sa scène de sacrifice au cinquième acte, rappelant cette fois Isabelle Adjani dans la Reine Margot, comme l?a écrit Catherine, a révélé une excellente tragédienne. Même sur une scène plus prestigieuse, pour une telle caractérisation d?un rôle si ardu, j?aurais volontiers pardonné ses aigus un peu faux.

J?ai aussi beaucoup aimé le Marcel de Philippe Kahn. Il a su rendre palpable toute la richesse de ce personnage qui est selon moi, avec Nelusko, le plus émouvant, le plus "vrai" qu?ont créé Scribe et Meyerbeer. En outre, sa prononciation et sa projection étaient parfaites, et il a crânement assumé tous les graves du Choral de Luther, ceux-là mêmes que Nicolai Ghiaurov transposaient à l?octave du dessus.

En lisant cette appréciation élogieuse de Cela dans Valentine et Kahn dans Marcel, on comprendra mieux pourquoi j?ai tant aimé leur duo du troisième acte.

J?ai beaucoup moins de bien à dire de la Marguerite de Sally Silver. Contrairement à ce que pensent beaucoup de fans de Joan Sutherland, son personnage n?est pas, de loin, le plus important de l?opéra. Cependant, afin de compenser l?affront fait aux sopranos stars de la maison de confier le personnage féminin principal à la jeune Cornelie Falcon, Meyerbeer a écrit pour Marguerite un grand air à roulade au deuxième acte, qui, suivi du duo avec Raoul, devait permettre à son interprète de briller. L?artifice n?avait cependant pas échappé à Laure Cinti-Damoreau, Prima Donna de l?Opéra, et si elle avait emporté sur Julie Dorus-Gras pour créer Isabelle, elle lui laissa la primeur pour Marguerite.

Bizarrement, alors que ce rôle est plus facile à distribuer (on trouve de nos jours plus facilement une Lucia qu?une Aida), j?ai trouvé Sally Silver très en dessous de ce qu?on était en droit d?attendre d?elle. Si, à son actif, la voix était assez ample et bien projetée, si on échappait à un oiseau mécanique aigrelet, le passif était bien lourd. Comment passer en effet sur des vocalises savonnées, des piqués criés et des aigus beaucoup plus faux que ceux de sa cons?ur Alketa Cela. Sans compter qu?au milieu des jeunes filles de la cour, sa Marguerite tenait moins de la Reine un peu (sic) légère que de la mère maquerelle encore un peu fraîche. Beauté divine enchanteresse nous l?a montré sous un meilleur jour. Le tempo excessivement lent du chef ne devait pas y être pour rien.

Dans l?ensemble j?ai été d?autant moins convaincu que, je le répète, je crois ce rôle un des moins difficile à distribuer de l?opéra.

J?ai à peu près la même chose à dire de la chanteuse qui campait Urbain. Est-ce un signe, je n?arrive absolument pas à me souvenir de son nom. Comme je crois l?avoir déjà écrit plus haut, pour ce personnage, on a le choix entre mezzo et soprano léger. Dans le premier cas la voix est plus androgyne et peut avoir plus de corps, on peut d?ailleurs en profiter pour lui donner son Rondo Non, non, non, vous n?avez jamais je gage. Dans le second cas, on rend le caractère léger et brillant du page et on met en valeur ses vocalises et ses aigus, notamment dans la scène des baigneuses du III : Jeunes beautés sous ce feuillage. En passant, cette dernière option permet aussi de rajouter un contre ré conclusif au premier acte du plus bel effet.

Las, à Metz nous avons eu une soprano mais, en fait d?aigus et de vocalise, ce n?était pas vraiment fête. Ainsi la vocalise à la fin d?Une dame noble et sage était ratée, la note tenue dans l?ensemble final du I, Tout ! Tout ! Le plaisir les honneurs la puissance?, ne l?était pas et le passage en écho entre Urbain et Marguerite dans la scène des baigneuses dont j?ai déjà fait mention était un massacre. Je veux bien que Chenonceau soit en Sologne, mais ce n?était pas une justification pour une telle chasse aux canards ! Enfin, passons?

Dans une version (quasi)intégrale des Huguenots, telle que nous l?avons entendue samedi, le rôle de Nevers prend tout son relief alors qu?en comparaison celui de Saint-Bris apparaît plus réduit. L?illusion d?optique causée par la présence sur scène ne doit cependant pas faire oublier que ce dernier est le moteur d?une des scènes les plus réussie de l?opéra et même de toute l??uvre de Meyerbeer : la Conjuration et bénédiction des poignards.

Jean-Philippe Marlière s?en est acquitté avec toute la dignité fanatique requise. D?ailleurs, à plusieurs moments, son chant m?a fait penser à celui d?Alain Vernhes, en un peu moins bien, ce qui n?a fait que me confirmer que ce dernier serait parfait dans ce rôle. A défaut, et même s?il lui manque un zeste de charisme physique et vocal, la voix bien timbrée de Monsieur Marlière, sa prononciation irréprochable et son respect scrupuleux du phrasé font parfaitement l?affaire.

J?ai eu beaucoup de mal à retenir le nom du chanteur qui campait Nevers. J?ai d?autant plus honte qu?il était très bon. Grand et assez bon acteur, il n?a pas laissé passé l?occasion de ses répliques du IV. S?il est d?ailleurs resté sagement à l?octave pour Que Dieu juge entre nous, son aigu sur Parmi mes illustres aïeux dont la gloire ici m?environne, je compte des soldats, mais pas un assassin ! était très réussit. De même, il a su rendre les nuances de noblesses et d?amour à la fin du troisième acte dans ses très beaux Où vous suit un captif orgueilleux de ses fers. Je serai plus réservé sur sa prestation au premier acte, mais dans l?ensemble, du fait du caractère très plébéien des gentilshommes catholiques, j?ai été très moyennement convaincu par cet acte.

En conclusion : Merci Laurence Dale !

Oui, Meyerbeer est un bon compositeur d?opéra. Oui ses ?uvres sont jouables. Non ce n?est pas de la musique facile au kilomètre mais une vraie musique de théâtre, à l?orchestration riche et sophistiquée, qui allie chant dramatique et brillant, avec des personnages forts. Ces Huguenots, pourtant montés avec des moyens modestes l?ont prouvé. L?Africaine à Strasbourg la veille, dans une optique très différente et avec des moyens qui ne l?étaient pas moins, en ont été une autre preuve.

Pendant la représentation des Huguenots, un ami m?a glissé une phrase qui m?a fait très plaisir : "maintenant je comprends pourquoi tu aimes tant Meyerbeer"

Elle est pas belle la vie !

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XAVIER, elle est MAGNIFIQUE la vie à METZ !!!

Message par tristan » 15 juin 2004, 11:07

Tout d' abord , un grand MERCI à tous pour vos écrits sur les HUGUENOTS que j' ai lus attentivement!J' ai peu de remps aujourd' hui pour dire tout ce que j' ai aimé, observé et enfin compris sur cet ouvrage que j' attendais depuis.......TONY PONCET!!!!!!!
Aujourd' hui, jr veux seulErment dire à XAVIER que je partage son enthousiasme,son "meyerbeerisme" et ......grand nombre de ses passions sur cette représentation!
Pour aujourd' hui, je ne parlerai que d' une seule interprète:
ALKETA CELA est depuis dimanche mon nouvel amour tristanesque!!!
La voix est large, charnelle ,émouvante et m' a souvent pris aux"tripes"!!!
Foin des considérations intellectuelles et du décorticage de partition,j' ai eu une vraie émotion,comme nous en cherchons tous, me semble-t-il, à l' entendre........et à la regarder......alors..........j'étais au 1° rang d' orchestre et je n' ai pas perdu une miette de l' expression de chaque visage, des intentions exprimées ou latentes de chaque ACTEUR,car nous avons eu de vrais acteurs pour la plupart.Le duo avec MARCEL fut un moment intense......j' y reviendrai....
Je voudrais clore aujourd' hui avec VALENTINE que j' ai trouvée belle ,engagée et sincère!!!!!!qualité rare et prenant des risques ;mais je puis dire que certains soirs la petite fragilité et une légère trace de fatigue
chez une interprète m' émeut plus que certaines "perfections justes et glacées".........
Dans un prochain "feuilleton ,je reviendrai sur les autre interprètes ,le chef, la mise enscène......écoutons les HUGUENOTS en attendant LIEGE....

Verrouillé