Si le fil est destiné à être fermé dans cinq jours, cela me donne le temps de préciser ma pensée, quitte à me répéter. (se répéter dans un forum, c'est assez justifié car tout le monde ne peut pas tout lire).
Les œuvres historiques (La guerre et la paix, Macbeth, Dialogues des Carmélites, Le pré aux clercs, Boris Godounov, la Khovantchina, Anna Bolena, Maria Stuart, le Roi Roger, Adriane Lecouvreur Don Carlos etc dans lesquelles sont représentés des personnages ayant réellement vécu dans le passé) ne se prêtent absolument pas à des transpositions temporelles, qui d'ailleurs sont rares. Si vous les transposez à une autre époque par exemple la nôtre, c'est un coup de force majeur qui a pour effet de vider complètement l'oeuvre de son sens, et c'est une catastrophe. Le moindre inconvénient est qu'il y a désaccord entre ce que vous voyez sur la scène et ce que dit le texte, qui n'a pas été changé. Vous ne pouvez qu'aboutir à des absurdités et à des impasses. Par exemple les vêtements de la foule dans les dernières scènes de Don Carlos que signalait Paco.
Il est en à peu près de même des opéras qui ne sont pas basés sur des récits historiques, mais dans des contextes culturels et religieux du passé, et là, les transpositions à une autre époque sont également très nuisibles. Par exemple Lohengrin. Que peut signifier une histoire d'ordalie au XIXe siècle ? Mais il y a des contre-exemples, transposer les Maîtres Chanteurs au XIXe siècle n'est pas génant car au XIXe siècle, il y avait, peut-être, encore des corporations de chanteurs. Enfin, c'est pas sûr.
J'estime que quand un opéra a un sujet majeur, le metteur en scène ne doit pas passer à côté de ce sujet, et s'en faire une gloire. Je trouve très fâcheux qu'une œuvre historique, basée sur un drame historique soit traitée en négligeant cette dimension, et en s'arrangeant pour qu'elle soit incompréhensible. C'est quand même assez paradoxal, D'un côté, on dépolitise ce qui est éminemment politique, cf Don Carlos, de l'autre on politise à tour de bras, Olivier Py avait politisé Aîda, il avait également mais c'était plus légitime politisé Mathis le peintre la scène était envahie de drapeaux rouges et de gabardines très évocatrices. Coline Serreau avait fait, comble d'absurdité une Chauve souris où apparaissaient des pyjamas rayés établissant une équivalence entre une mauvaise plaisanterie et les persécutions anti-sémites. Jadis, Jean-Louis Martinoty mettait ostensiblement l'Humanité dans la poche de Luigi, dans sa mise en scène de Il tabarro, mais c'était il y a longtemps.,
Les grandes belles œuvres inscrites au répertoires que nous admirons tant sont admirables par leur simplicité. C'est ce qui fait qu'elle sont accessibles au grand public. Ces œuvres se suffisent largement à elles-mêmes. C'est pourquoi elles n'ont pas besoin d'être parasitées par de petites idées bizarres, incongrues, arbitraires, quelque peu ésotériques, des références cinématographiques que ne saisiront qu'une toute petite élite versée dans la cinéphilie .
Je trouve absurde de chercher à mélanger des genres différents, le grand drame romantique et un genre cinématographique du siècle passé qui n'a vraiment rien à voir, et je me demande ce que ça peut donner de bon sinon quelque chose de bizarre et de peu convaincant qu'on aura vite fait d'oublier. J'y vois un petit jeu d'intellectuel dans lequel l'art ne trouve pas son compte.
Je me plains de toutes ces mises en scène qui nous ont été présentées ces derniers temps, qui sont peu lisibles, dénuées de la plus élémentaire beauté plastique, qui écrasent complètement les contextes historiques en opèrant des transpositions temporelles intempestives, comme le signalait très justement Patricenord que je rejoins tout à fait.
Faustin