La Walkyrie - Jordan/Krämer - ONP mai/juin 2010

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Message par GGOPERA » 01 juin 2010, 13:47

Nous sommes d'accord : lorsque j'évoquais le manque de théâtralité de la direction de Jordan, cela m'a surtout frappé au I. Idem pour le "décevant" RD Smith.

Par contre, je n'exonère pas le m.e.s. : il y a mieux à faire que des allers-retours cour/jardin, avec des chanteurs totalement laissés à eux-mêmes : ces dernières minutes du I devraient tout emporter sur leur passage et hier soir... je suis resté sur place (et de glace!)

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jeanch
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Re: un conseil de révision de nouveau type

Message par jeanch » 01 juin 2010, 13:59

faustin a écrit :Le problème, c'est qu'il n'y a plus de chevauchée, elle est remplacée par une danse effrenée, de je ne sais qui, en arrière plan.

Les infirmières/walkyries ne ramènent pas les guerriers de la mort à la vie, elles les font passer à une autre vie surnaturelle, moyennant de légers soins corporels et un petit traitement dont elles gardent le secret. C'est comme un nouveau conseil de révision. Bon pour le nouveau service, allez, au suivant! Tout cela est plein d'humour de de dérision, cette séquence choc m'a énormément surpris (de l'avantage de voir les spectacles à la première) et beaucoup plu, en tout cas bien amusé. Mais il y a une complète rupture de style, on passe du dramatique le plus noir au burlesque, dans la scène la plus emblématique.
8O
Venant de toi qui réclames habituellement la plus grande fidélité au livret, ça ne manque pas de sel de défendre la scène des walkyries tournée en dérision ! :lol:
Allez faustin, on relit le livret, il n'est pas question d'infirmières !

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Cesare
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Re: un conseil de révision de nouveau type

Message par Cesare » 01 juin 2010, 14:16

Bonjour à tous, je m'invite finalement sur ODB (un peu plus familier d'un autre site qui a fermé...). Un mot sur l'ambiance : très bon acceuil sauf pour Krämer. Le spectacle a été hué dès le rideau final par des spectateurs qui n'ont pas apprécié la mise en scène (surtout pour le III je pense). J'ai laissé trainer l'oreille et le doute n'est pas permis : nous avons affaire aux mêmes petits polissons qui ont déjà Warlikowski à leur tableau de chasse (il ne faut pas confondre ces deux metteurs en scène, je sais). Des gens qui trouvent provocante toute tentative qui décale un peu les attentes. Très bon acceuil pour tous les chanteurs et le chef.

Sur le site de l'ONP, Krämer nous explique qu'il voit dans cet opéra des humains se livrant une guerre civile instrumentalisée par les Dieux. Et voilà, tout est dit : c'est une idée parfaitement défendable et bien défendue. C'est le fil rouge, ce qui assure la cohérence du propos. Siegmund est le rescapé d'un pogrum ; Wotan et Fricka manipulent tout ça dans leur Germania (l'envers du décor de la fin de l'or du Rhin avec jeu de miroir : bonne idée) ; les Walkyries sont dans une sorte de morgue où l'on travaille presque à la chaîne. Ben oui, la boucherie entre les hommes bat son plein. Le feu que Wotan promet à sa fille pour la protéger devient un effrayant paysage rougeoyant dévasté (si vous avez vu la Guerre des Mondes de Spielberg, c'est ça), qui fait peur, effectivement. Mais il est vrai qu'on est loin des flammèches protectrices suggérées par la musique. Krämer cherche le décalage : il a le droit. Même si des spectateurs n'apprécient pas. Attention : je n'ai pas tout aimé (la direction d'acteur est souvent un peu limite). Mais j'en ai marre des hueurs, il n'y a qu'à l'opéra, et surtout à Paris, qu'on voit ça. La plupart d'entre eux sont débiles, en plus. Je n'ai jamais vu corbeau blanc ni de hueur intelligent. Voilà ma devise.

Côté vocal : difficile de faire mieux, franchement. Mais à une exception près. J'ai trouvé Dean Smith parfait dans le contexte scénique, fragile et brave à la fois. La projection était suffisante (OK, ce n'est pas Seiffert. Eh bien ! je préfère Dean-Smith dans ce rôle!). Merbeth absolument investie, émouvante sans faiblesse. Le couple des jumeaux, c'est le point fort. Naef ne manque pas d'abattage dans Fricka. Groissböck pourrait être plus noir, mais il est crédible. Dalayman m'a surpris en bien. Elle n'a pas la ligne de chant aussi souple que les Brünnhilde de légende, mais elle a les moyens du rôle. Sa caractérisation du rôle ne m'a pas particulièrement marqué cependant. Point faible (noir à mes yeux) : le Wotan de Thomas Johannes Mayer. Je n'ai rien contre les Wotan genre petit format, mais de là à s'étrangler...Certes, il s'en sort par moment. Ce chanteur a pourtant un vrai talent de caractérisation, mais c'est une erreur de distribution, surtout dans le vaisseau de Bastille. J'ai été beaucoup plus convaincu par Jordan ici que dans l'or du Rhin. Go and enjoy it (les parasites hueurs auront foutu le camp).

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Message par DesGrieux92 » 01 juin 2010, 15:48

Cesare a écrit : Mais j'en ai marre des hueurs, il n'y a qu'à l'opéra, et surtout à Paris, qu'on voit ça.
paco a écrit :La première du Tristan tant attendu au ROH (Pappano – Stemme, Heppner, Koch, Volle) a reçu un accueil pour le moins… contrasté !

Enorme ovation (méritée) pour Michael Volle et Sophie Koch, triomphe assourdissant pour Nina Stemme (dont la prestation inoubliable mérite le voyage), accueil chaleureux pour Heppner, standing ovation pour Antonio Pappano, de nombreux spectateurs au parterre et à l’amphi se levant, puis...

... une bronca comme je n’en ai jamais entendue au ROH a accueilli Christoph Loy et son équipe.
Habitué à quelques mouvements de désapprobation à chacune de ses mises en scène au ROH, Mr Loy a cette fois semblé surpris de l’ampleur du tollé. Autour de moi (amphi), je ne voyais que des gens portant leur main en porte-voix pour mieux faire entendre leurs « hou », les autres – dont moi – restant silencieux, quelques dames applaudissant poliment. Je me suis levé pour observer le parterre, le spectacle valait le coup d’œil, on se serait cru à Chelsea… ;-)
mc06 a écrit :Emma Dante conspuée par un public [milanais] qui n'est pas trop exigeant sur le chant en ce soir de première , excepté la très belle interprétation de Kaufmann en José ;
:lol:

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Re: un conseil de révision de nouveau type

Message par abaris » 01 juin 2010, 15:54

Cesare a écrit :Nous avons affaire aux mêmes petits polissons qui ont déjà Warlikowski à leur tableau de chasse (il ne faut pas confondre ces deux metteurs en scène, je sais). Des gens qui trouvent provocante toute tentative qui décale un peu les attentes.
Et bien non, justement. Krämer a été hué pour des raisons très divergentes. Il y a ceux qui trouvent sa scénographie laide, ceux qui ne supportent pas le décalage avec le livret....

Et puis il y a tous ceux qui aiment les mises en scène modernes, sont ouverts aux propositions radicales, fussent-elles provocatrices et qui ont tout de même été affligés par la mise en scène de Krämer.

Pas de concept narratif clairement affirmé depuis le début de Rheingold, pas de cohérence stylistique, aucune direction d'acteurs et des chanteurs abandonnés à eux-mêmes sur le plateau. Et l'oeuvre est constamment rabaissée, parodiée ou tournée en dérision : les chorégraphies ridicules, les pommes, les costumes de Rheingold.
l
Et tout celà est tellement daté, fleure tellement son Regietheater des années 1970-1980 : les milices paramilitaires, la guerre nucléaire. Tu parles d'une vision décalée.

Alors effectivement, il ne faut pas confondre Warlikowski et Krämer : le premier fait du théâtre, ce que fait l'autre relève de l'enfumage qui ne fera illusion qu'auprès des ceux qui ont passé les 30 dernières années sur une île déserte.

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Message par raph13 » 01 juin 2010, 15:56

Pas besoin d'aller chercher si loin, lors de la 1ère de Hamlet, si l'on en croit la presse, le public marseillais a réservé un accueil houleux au metteur en scène Vincent Boussard - mise en scène à mes yeux très réussie et ne comportant rien de particulièrement "choquant"...
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Message par GGOPERA » 01 juin 2010, 16:02

La baignoire d'Ophélie, peut-être ? :D

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Message par raph13 » 01 juin 2010, 16:28

GGOPERA a écrit :La baignoire d'Ophélie, peut-être ? :D
Personnellement, j'ai trouvé l'idée très bonne, surtout lorsque à la fin de l'acte Ophélie glisse peu à peu vers le fond tout en chantant ses dernières vocalises, tandis que des feuilles surgissent une par une du fond de la scène : une très belle image.
Surtout, vu le dispositif scénique unique, je vois mal comment le metteur en scène aurait pu insérer un lac dans tout ça...
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Message par paco » 01 juin 2010, 17:47

DesGrieux92 a écrit :
Cesare a écrit : Mais j'en ai marre des hueurs, il n'y a qu'à l'opéra, et surtout à Paris, qu'on voit ça.
paco a écrit :La première du Tristan tant attendu au ROH (Pappano – Stemme, Heppner, Koch, Volle) a reçu un accueil pour le moins… contrasté !

Enorme ovation (méritée) pour Michael Volle et Sophie Koch, triomphe assourdissant pour Nina Stemme (dont la prestation inoubliable mérite le voyage), accueil chaleureux pour Heppner, standing ovation pour Antonio Pappano, de nombreux spectateurs au parterre et à l’amphi se levant, puis...

... une bronca comme je n’en ai jamais entendue au ROH a accueilli Christoph Loy et son équipe.
Habitué à quelques mouvements de désapprobation à chacune de ses mises en scène au ROH, Mr Loy a cette fois semblé surpris de l’ampleur du tollé. Autour de moi (amphi), je ne voyais que des gens portant leur main en porte-voix pour mieux faire entendre leurs « hou », les autres – dont moi – restant silencieux, quelques dames applaudissant poliment. Je me suis levé pour observer le parterre, le spectacle valait le coup d’œil, on se serait cru à Chelsea… ;-)
mc06 a écrit :Emma Dante conspuée par un public [milanais] qui n'est pas trop exigeant sur le chant en ce soir de première , excepté la très belle interprétation de Kaufmann en José ;
:lol:
C'est amusant que tu sois allé retrouver ces exemples, car j'allais justement répondre à Cesare que, hélas, les londoniens se sont aussi mis à cette mode, désormais tous les metteurs en scène s'y font systématiquement huer, que ce soit classique, avant-gardiste, sérieux, fumiste, peu importe, le bouc émissaire s'est exporté. Peut-être parce-que les français sont désormais très nombreux ds le public du ROH ? En tous cas je suis d'accord avec Cesare, c'est agaçant surtout quand parallèlement on réserve des triomphes à des interprètes musicaux pas forcément sublimes

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Message par Gustavo » 01 juin 2010, 18:57

Je suis tout à fait d'accord avec ce que dit Cesare sur l'ensemble de la soirée - qui m'a beaucoup surpris, en bien, après un Or du Rhin assez intéressant scéniquement mais finalement assez pâle vocalement ( seuls Donner et Erda m'avait semblé à leur place)

Il est certain que le point faible de ces deux productions reste les basses, jamais assez profondes (Hunding/Wotan) pour vraiment remplir un vaisseau comme Bastille : mais compte-tenu des agendas très remplis des 2 ou 3 très grandes basses que l'on serait en droit d'attendre à Bastille ( Terfel/Pape ...je laisse les spécialistes compléter la liste !), réunir une bonne distribution pour le Ring en 3 ans est déjà méritoire.

Car les "faiblesses' des basses sont toute relatives, j'ai personnellement été très sensible à l'incarnation de Mayer et à la beauté de son timbre ( pour moi il est bien mieux que Struckman)

Dalayman est effectivement tout à fait à sa place, avec non seulement l'engagement et les aigus mais aussi un vrai médium suffisamment chaud et plein pour laisser place aux sentiments - Merbeth domine bien sûr, mais j'ai surtout noté une voix dure, très dure dans les aigus et surtout un manque de féminité assez dérangeant pour Sieglinde (dans quelques années elle pourra faire une très grande Brunhilde) .

Très belle Fricka de Naef .

Dean Smith m'a aussi beaucoup surpris en bien ( je n'avais pratiquement pas entendu son Paul, noyé par la musique) : là ( et j'étais situé aux mêmes places en fond d'orchestre) tout passe, ses Walse étaient très beaux et la fragilité du timbre rend le personnage très humain.

Quant à la production, elle est très belle et très prenante, même si j'avoue ne pas avoir tout compris (à quoi sert le jeu des pommes entre Bruhnhile de Siegmund ?, pourquoi Brunhilde passe-telle sous la table sur les dernières notes ? ) : mais tout cela n'est que broutilles par rapport à un ensemble qui fait ressortir des thématiques récurrentes par rapport à l'Or du Rhin : on sent là qu'un vrai Ring se met en place, certes très physique et violent mais toujours respectueux des indications du texte ( quand Wotan évoque au II avec sa fille l'armée qu'il est obligé de constituer contre Alberich , on voit cette armée se constituer au fur et à mesure que les Walkyries ramènent à la vie les guerriers morts - très belle idée et tant pis pour ceux que la nudité gêne encore !); c'est vrai que les allers-retours de Sieglinde courant à l'avant scène sont un peu systématiques et que certains jeux de scènes pourraient être améliorés ( la tableau du frêne) - mais à côté de cela que d'images poétiques ( les arbres en fleurs, l'image finale absolument stupéfiante de beauté ...) toujours en situation! De plus, comme dans l'Or du Rhin, Kramer a l'intelligence de faire jouer les acteurs très en avant de la scène - ce qui favorise la projection des voix dans la salle ...

Quant à l'orchestre , il était hier soir complètement métamorphosé par rapport à l'Or du Rhin et l'ovation finale était parfaitement justifiée...

Bref une très grande soirée et j'envie ceux qui vont découvrir ce spectacle dans les prochains jours !

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