Cavalleria rusticana / Pagliacci - Campos Neto / Perez - Avignon - 03/2020

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JdeB
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Cavalleria rusticana / Pagliacci - Campos Neto / Perez - Avignon - 03/2020

Message par JdeB » 11 mars 2020, 10:54

Direction musicale Miguel Campos Neto
Mise en scène Eric Perez
Scénographie, costumes Diane Belugou
Lumières Joël Fabing

Cavalleria rusticana
Santuzza : Chrystelle di Marco
Lola : Ania Wozniak
Turiddu : Denys Pivnitskyi
Alfio : Dongyong Noh
Lucia : Gosha Kowalinska

Pagliacci

Nedda : Solen Mainguené
Canio : Denys Pivnitskyi
Tonio : Dongyong Noh
Beppe : Jean Miannay
Silvio : Jiwon Song

Chœur de l’Opéra Grand Avignon
Orchestre Régional Avignon-Provence

Avignon, le 8 mars 2020

En coproduction avec le Centre Lyrique Clermont-Auvergne, l’Opéra de Massy, l’Opéra de Reims et Opéra Eclaté – Festival de Saint-Céré


Le metteur-en-scène Eric Perez annonçait d’emblée la couleur dans le programme : "Nous allons relater deux drames de la jalousie, deux faits divers violents, tels qu’on peut les lire dans les journaux, tels qu’on peut les voir de nos jours sur les chaines d’informations, avec leurs témoignages sordides, leurs images obscènes...". Il semble plutôt avoir joué à fond la carte du" théâtre dans le théâtre". Cet axe de mise en scène n'a en soit rien de choquant puisque s'agissant de Pagliacci, c'est exactement le propos, seulement le travail réalisé par le metteur en scène toulousain, poussa son parti pris, jusqu'à déplacer Il Prologo "Si puo, Si puo" de Pagliacci en tout début de représentation, en ouverture de Cavalleria Rusticana, comme pour indiquer à l'assistance, qu'en réalité, les deux histoires allaient être contées par une seule et même troupe. Le propos n'est pas inintéressant, même plutôt habile, et découlerait même d’une certaine logique. Malheureusement il souffre de trois défauts. Le premier est qu'il détricote une œuvre existante pour la faire coller à une autre , le second est qu'il perd les spectateurs. Enfin il ne s'agit que d'une fausse innovation, le principe ayant déjà été vu et revu. . Ce parti pris fut d'autant plus surprenant que dans le cas présent ce fut Jiwo Song en charge du rôle de Silvio qui chanta le prologue. Un prologue très bien interprété, certes, mais du coup il y avait de quoi s'y perdre. Une fois le rideau ouvert(moment assez long à venir après le début de la représentation), ce fut donc dans le théâtre de Pagliacci que fut narrée l'histoire de Cavalleria d'une façon assez inattendue et pas toujours convaincante.
Notons cependant quelques moments scéniques très réussis, comme la représentation vivante de Marie-Madeleine se recueillant sur la dépouille de Jésus, venant souligner à merveille l'hymne de Pâques de Cavalleria Rusticana, où les acrobaties sympathiques de Beppe.

La distribution est constituée des lauréats du 26ème Concours international de chant de Clermont-Ferrand.

Le ténor ukrainien Denis Pivnitskyi est un peu le point faible de cette distribution. Il campa un Turridu et un Canio tout en noirceur mais manquant singulièrement de passion. Le timbre est puissant, mais engorgé, les aigus manquent d'éclats et la diction laisse à désirer. Le chanteur se déplace sur scène avec une certaine indolence qui ne colle pas toujours avec le caractère excessif des deux rôles. Néanmoins la voix est solide et possède la couleur requise. Dans Pagliacci l'énergie faisait défaut au jeune ténor, et même s’il possède de réels talents de comédiens, il lui fut difficile de communiquer la terreur qu'est supposée susciter la scène finale.

Chrystelle Di Marco s’avéra une Santuzza à la hauteur de l'enjeu. Elle se montra tour à tour, sensible, jalouse et intrigante. Le timbre de la chanteuse toulonnaise est remarquable de puissance et de noirceur. Les aigus sont correctement maîtrisés. Sa prestation fut remarquée et applaudie.

Dongyong Noh se montra irréprochables en Tonio, belliqueux et machiavélique à souhait. Il est bien dommage que cette production le prive du "Si Puo" qui lui revenait, car il est indéniable que la magnifique étendue de sa voix l'aurait admirablement bien servi. Il sut aussi rendre un Alfio tout en impétuosité et en colère, une sorte de Iago de campagne prêt à tout pour se venger. Il sera intéressant à l'avenir de suivre le sud-coréen dans les grands rôles de baryton dramatique.

Le pendant de Dongyong Noh, fut à bien des égards le baryton Jiwon Song. Il avait pour mission de cumuler le rôle de Silvio et l'aria du Prologo "Si Puo..." subtilisée à son compatriote Dongyong Noh. Dans quel but et pour quel motif ? Nul ne le sait. Le fait est que le timbre de Jiwon Song même s’il semble un peu plus clair que l'interprète de Canio, reste celui d'un baryton dramatique tout à fait sérieux et doté de grandes aptitudes scéniques. La mise en scène cantonnait le jeune chanteur à errer au milieu du public et même si là aussi on flirte avec une fausse modernité quasi-systématique de nos jours, cela a eu le mérite de bien situer le personnage de Silvio, en marge de la troupe, dans la clandestinité. Aussi dans la grande scène d'amour avec Nedda, où chacun des deux partenaires se trouvait séparé par la fosse d'orchestre, le public ne put que percevoir le vide sidéral qui sépare les deux amoureux, et l'extraordinaire gouffre dans lequel ils s’apprêtent à tomber. De ce point de vue la mise-en-scène a vu juste. Jiwon Song fut un Silvio émouvant et bouillonnant à souhait. Dans le "Si Puo"on ne put que remarquer son extraordinaire technique et l'expressivité de son visage affublé d'un sourire à faire fondre un radiateur.

La soprano cavaillonaise Solen Mainguené fut une Nedda de tout premier plan. Avec une voix à la fois suave et prenante, elle sut habilement trouver la juste mesure entre pathos et papillonnage. L'interprétation était juste, sans fioriture mais efficace.
Gosha Kovalinska et Ania Wozniak donnèrent à leur rôle respectif (Mamma Lucia et Lola), toute l'ampleur nécessaire, à la fois sobre et efficace. Leur prestation fut elle aussi acclamée par le public.

A noter l'extraordinaire et acrobatique interprétation du ténor Jean Miannay, qui dans l'arlequinesque rôle de Beppe apporta beaucoup de fraîcheur à la production.

L'orchestre Régional Avignon Provence fut dirigé de la main délicate et sensible de Miguel Campos Neto, qui sut faire ressortir toute la véracité et la couleur spécifique de ces deux opéras.
Les chœurs de l'Opéra d'Avignon s'avèrent d'une grande régularité et ont, une fois de plus, apporté solidité et intensité aux deux ouvrages à l’affiche.

Cette production ne manquait ni de voix ni de talents mais juste d'une mise-en-scène moins confuse et qui regarde l'intrigue dans le fond des yeux.

Alain Gabriel
Parution de ma biographie "Régine Crespin, La vie et le chant d'une femme" ! Extraits sur https://reginecrespinbiographie.blogspot.com/
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Re: Cavalleria rusticana/ Pagliacci- Campos Neto/Perez- Avignon- 03/2020

Message par PlacidoCarrerotti » 11 mars 2020, 11:06

Je ne sais pas si le ramage de Solen Mainguené se rapporte à son plumage, mais on met la barre très haut !
"Venez armé, l'endroit est désert" (GB Shaw envoyant une invitation pour l'une de ses pièces).

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Il prezzo
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Re: Cavalleria rusticana / Pagliacci - Campos Neto / Perez - Avignon - 03/2020

Message par Il prezzo » 18 mai 2022, 16:52

Reprise de cette production à l'opéra de Massy.

La mise en scène est vraiment cohérente, le Prologue de Pagliacci, cette fois en ouverture de ce diptyque, m'humidifie toujours un peu les yeux, une nostalgie inconsciente, je pense, d'acteur/chanteur manqué, carrière que je ne désespère pas de faire dans une autre vie! Chanté par l'excellent coréen Dongyong Noh, au timbre de baryton puissant et chaleureux, il augure bien de la suite (il sera parfait en Alfio, puis Tonio).

La mise en abime du théâtre dans le théâtre, comme relevé par Jérôme, marche assez bien, même si, dans Cavalleria, il y manque le supplément d'émotion, la canicule sicilienne, le rendu de l'oppression sociale...qui étaient si bien illustrés dans une mise en scène que je n'arrive plus à identifier, où les habitants étaient assis en cercle sur la place du village, dans de magnifiques couleurs ocres, et "contrôlaient" l'action des protagonistes.

J'ai trouvé la Santuzza de Chrystelle di Marco rudement braillarde et vulgaire, desservie de plus par un costume qui soulignait maladroitement sa silhouette ingrate; David Belugou (et non Diane, comme indiqué plus haut :D) avait beaucoup mieux réussi ceux de sa récente Ariadne avec Michel Fau.
Totalement d'accord avec Alain G. quant à l'appréciation du ténor Pivniskyi. Aigus puisssants, mais timbre moche.

Globalement, c'est Pagliacci (Leoncavallo bien supérieur à Mascagni, je trouve) qui domine largement cette production, surtout grâce à Solen Mainguené, justesse, abattage interprétatif, luminosité vocale...on devrait être amené à revoir cette excellente chanteuse dans d'autre grands et premiers rôles.
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Re: Cavalleria rusticana / Pagliacci - Campos Neto / Perez - Avignon - 03/2020

Message par dessoles » 18 mai 2022, 21:43

Ce n est pas possible.... Un tenor ukrainien médiocre ?????? Vous avez mal entendu..... C était le meilleur. Je vous l assure.... 😂😂😂😂

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Il prezzo
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Re: Cavalleria rusticana / Pagliacci - Campos Neto / Perez - Avignon - 03/2020

Message par Il prezzo » 19 mai 2022, 08:34

dessoles a écrit :
18 mai 2022, 21:43
Ce n est pas possible.... Un tenor ukrainien médiocre ?????? Vous avez mal entendu..... C était le meilleur. Je vous l assure.... 😂😂😂😂
C'est censé être drôle ?
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Re: Cavalleria rusticana / Pagliacci - Campos Neto / Perez - Avignon - 03/2020

Message par dessoles » 19 mai 2022, 12:53

Moqueur...

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