Benjamin - Written on skin - Benjamin/VC - Philharmonie de Paris - 14/02/2020

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Benjamin - Written on skin - Benjamin/VC - Philharmonie de Paris - 14/02/2020

Message par HELENE ADAM » 13 févr. 2020, 11:16

Written on skin
Musique de George Benjamin
Livret de Martin Crimp
Création à Aix en Provence en 2012

Vendredi 14 février 2020 à la Philharmonie de Paris, version mise en espace.
Orchestre Philharmonique de Radio France
George Benjamin, direction

Ross Ramgobin, the protector
Georgia Jarman, Agnès
Tim Mead, Angel 1, the boy
Victoria Simmonds, Angel 2, Marie
Nicholas Sharratt, Angel 3, John
Philipp Alexander Marguerre, harmonica de verre

Romina Lischka, viole de gambe
Dan Ayling, mise en espace

NB : Initialement prévue dans le rôle d'Agnès, Barbara Hannigan a dû se retirer pour des raisons familiales

Cet opéra contemporain du compositeur Georges Benjamin avait défrayé la chronique en 2012 lors de sa création au festival d'Aix-en-Provence (il s'agissait d'ailleurs d'une commande du festival), remportant un très vif succès dans la mise en scène de Katie Mitchell. Il a été repris depuis sur plusieurs scènes d'opéra (dont le Capitole de Toulouse, l'opéra comique à Paris, le BSO à Munich et le ROH à Londres (etc), le ROH a édité un DVD).
C'est Martin Crimp qui a écrit le livret à partir d'une vieille légende occitane et il le résume ainsi : « Un riche propriétaire terrien invite chez lui un artiste chargé de réaliser un livre d'enluminures. Cet ouvrage doit immortaliser en images l'impitoyable exercice de son pouvoir politique et la paisible jouissance que lui procure l'ordre domestique, incarné dans l'humilité et l'obéissance enfantine de sa femme Agnès. Mais la réalisation de ce livre devient un catalyseur propice à la rébellion de l'épouse. Après une première tentative de séduction couronnée de succès, elle exploite sa nouvelle intimité avec l'enlumineur afin d'influencer le contenu même du livre, forçant son mari à la voir telle qu'elle est réellement – et ouvrant ainsi la voie à un ultime et extraordinaire acte de provocation. »
Quand Bernard Foccroule passe cette commande à Georges Benjamin pour Aix, le compositeur britannique n'a écrit qu'un seul opéra "Into the Little Hill (2006). Depuis il a également composé l'étonnant "Lessons in Love and Violence" (2018), toujours avec le même librettiste, et avec toujours autant de talent. Il est l'un des compositeurs contemporains les plus faciles d'accès.


Les liens ODB pour "Written on skin" et pour "Lessons in Love and Violence"

"Written on skin", dans l'ordre : Aix, Toulouse, Munich, Opéra Comique
https://www.odb-opera.com/viewtopic.php ... in#p182647
https://www.odb-opera.com/viewtopic.php ... in#p191402
https://www.odb-opera.com/viewtopic.php ... in#p202602
https://www.odb-opera.com/viewtopic.php ... in#p213450

"Lessons in Love and Violence, dans l'ordre : Londres, Hambourg, Lyon
https://www.odb-opera.com/viewtopic.php ... ce#p346858
https://www.odb-opera.com/viewtopic.php ... ce#p366954
https://www.odb-opera.com/viewtopic.php ... ce#p368736

le DVD
Image
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Re: Benjamin - Written on skin - Benjamin/VC - Philharmonie de Paris - 14/02/2020

Message par Loïs » 13 févr. 2020, 12:02

HELENE ADAM a écrit :
13 févr. 2020, 11:16
Cet opéra contemporain du compositeur Georges Benjamin avait défrayé la chronique en 2012 lors de sa création au festival d'Aix-en-Provence (il s'agissait d'ailleurs d'une commande du festival), remportant un très vif succès dans la mise en scène de Katie Mitchell. Il a été repris depuis sur plusieurs scènes d'opéra (dont le Capitole de Toulouse, l'opéra comique à Paris, le BSO à Munich et le ROH à Londres (etc), le ROH a édité un DVD).
Incontestablement une des meilleures créations auxquelles j'aurais assisté et la mise en scène originelle (Mitchell) comptait pour beaucoup.

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Re: Benjamin - Written on skin - Benjamin/VC - Philharmonie de Paris - 14/02/2020

Message par HELENE ADAM » 14 févr. 2020, 23:24

En attendant un retour sur la soirée exceptionnelle à la Philharmonie de Paris sous la direction du compositeur lui-même, je signale
- la retransmission par France Musique
https://www.francemusique.fr/emissions/ ... aris-80648
- le concert de clôture du "festival présences", dimanche 16 février à l'auditorium de Radio-France à 18h30, avec le premier opéra de Georges Benjamin "Into the Little Hill".
https://www.maisondelaradio.fr/evenemen ... esences-15

Saluts
Image

La retransmission sur France Musique de ce Written on skin en version concert, est précédée de la diffusion de deux autres oeuvres
George Benjamin : Dream of the song, pour contre-ténor, chœur de femmes et orchestre
Bejun Mehta contre-ténor
Chœur de chambre néerlandais
Orchestre royal du Concertgebouw d'Amsterdam
George Benjamin direction

et

Olivier Messiaen : O sacrum convivium
Chœur du King's College Cambridge
Stephen Cleobury direction
The Choir of King's college Cambridge
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Re: Benjamin - Written on skin - Benjamin/VC - Philharmonie de Paris - 14/02/2020

Message par HELENE ADAM » 15 févr. 2020, 15:39

Soirée du 14 février
C’est toujours un événement de pouvoir voir et entendre un opéra dirigé par son créateur et j’imagine que pour l’orchestre et les solistes, c’est également une expérience irremplaçable, une sorte de « direct » assez fascinant qui emporte toujours l’adhésion tant l’alchimie qui s’opère alors, se transmet intacte et fascinante, au public.
C’est d’autant plus vrai qu’il s’agit alors des spectateurs habitués de la Philharmonie de Paris et singulièrement des œuvres contemporaines qu’elle propose régulièrement, et de l’excellent orchestre philhamonique de Radio France, lui aussi coutumier des audaces de style.
L’ovation qui a suivi les dernières notes de l’un des opéras contemporains les plus intelligents de ces dernières années, valait récompense ultime pour le compositeur et chef Georges Benjamin, fêté pour le renouveau musical et scénique qu’il apporte à l’art lyrique avec ses œuvres.
« Written on skin » est un opéra d’une extrême violence dont le final est d’une cruauté terrifiante. Cette violence est exprimée essentiellement par la musique : celle de l’orchestration où dominent très largement cuivres et percussions, celle du chant où l’amplitude des écarts de notes exigée représente les passions désordonnées et tragiques des personnages, celle des ruptures brutales de volume et de style quand sont ménagées ces purs moments de bonheur et de calme avec la harpe, l’harmonica de verre et même la viole de gambe.
Le tout est parfaitement dosé, c’est l’une des immenses forces de cet opéra : jamais l’orchestre ne couvre les chanteurs malgré le déploiement de décibels, il entoure leur chant pour le valoriser et leur permet de déployer sans risque de sortir dans leur zone de confort, leurs tessitures volontairement très différenciées : contre-ténor, soprano, baryton, ténor, mezzo.

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Si la musique épouse l'histoire tragique, les paroles au contraire gardent en permanence la distance du « récit ». Le livret de Martin Crimp est un modèle du genre dont l’écriture obsède longtemps après la fin de la représentation. Un peu comme si les personnages étaient déjà tous morts et qu’ils renouaient le fil dramatique des événements en le racontant. Ils décrivent ce qu’ils font et leurs phrases commencent par « Il dit » ou « elle dit ». Discours indirect étrange et envoûtant qui nous transporte dans un monde irréel : sommes-nous revenus au moyen-âge qui vit naitre cette légende occitane dont s’inspire l’histoire ? Ou dans le monde des anges ? Passé, présent ou avenir ? Double présence et ambiguité permanente.

La mise en espace proposée sur la scène de la Philharmonie par Dan Ayling, ne remplace pas la mise en scène qui manque un peu, mais elle supplée très avantageusement au côté parfois très artificiel de la simple version concert. Car cette œuvre est un opéra et un opéra comporte du théâtre.
Nos artistes ont tous déjà joué ces rôles sur scène, tout comme d’ailleurs, il ont pu interpréter des rôles dans l’autre célèbre opéra de Benjamin, Lessons in love and violence. Ils connaissent les complexités de la partition, le style que Benjamin attend d’eux, les personnages qu’ils doivent camper et ils nous emmènent avec eux.
Et côté excellence vocale et scénique, nous étions comblés hier soir.
Image
Barbara Hannigan avait créé le rôle et Benjamin avait beaucoup travaillé avec elle la composition de son rôle en Agnès (la seule qui porte un nom), jouant sur la flexibilité extrême de sa voix, capable de superbes distorsions sans jamais paraitre criarde. L’ayant entendue dans cette salle de la phiharmonie qui ne favorise pas les voix, je doutais un peu qu’elle puisse s’y épanouir comme à Aix. Des problèmes personnels l’ont conduite à se retirer. Son remplacement par la soprano Georgia Jarman, que j’avais beaucoup apprécié dans « Lessons in love and violence » à Hambourg l’an dernier, s’est révélé un excellent choix. Son timbre est très brillant et remplit sans difficulté la salle, elle possède parfaitement la « musique » de Benjamin et nous a éblouis hier soir par la beauté de ses aigus, la solidité de son medium, et la facilité des acrobaties vocales qui les rendaient particulièrement harmonieuses.
Le contre-ténor Tim Mead, ange et boy, est un bonheur pour les oreilles lui aussi. Sa vois éthérée mais sonore, semble toujours venir d’ailleurs et c’est ce timbre suave et obsédant qui a lui seul, traduit magnifiquement le pouvoir de séduction du personnage. Les duos avec Jarman sont d’ailleurs des moments de pur rêve où l’on s’évade très loin des réalités dans une musique qui garde sa part de magie et de mystère.
Le baryton Ross Ramgobin (the protector) est l’homme, le maitre, le dominant. Beau timbre là aussi, empreint de toute l’autorité nécessaire, presque défaillant quand la colère le submerge, graves et aigus également impressionnants (sa partie monte très haut pour un baryton), il domine parfaitement son rôle.
Victoria Simmonds et Nicholas Sharratt complètent une très heureuse distribution.
Orchestre sublimé, chef dirigeant son œuvre, interprètes de haut vol, œuvre rare et étonnante, on ressort de tout cela sous le choc !
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Re: Benjamin - Written on skin - Benjamin/VC - Philharmonie de Paris - 14/02/2020

Message par jeantoulouse » 15 févr. 2020, 16:00

Merci chère Hélène pour ce compte rendu limpide.
Le Capitole de Toulouse était coproducteur du spectacle de la création et avait donc eu les honneurs du spectacle dès novembre 2012. Bejun Mehta, dédicataire de l'opéra, et qui est un chanteur exceptionnel, avait été remplacé par Tim Mead et Barbara Hannigan était Agnès aux côtés de Christopher Purves. Je garde un souvenir ému de cette découverte splendide et "secouante", et de la prestation vocale des trois interprètes. Frank Ollu dirigeait l’œuvre et George Benjamin avait assisté à ces représentations, galvanisant par sa présence, sa gentillesse, et son attentive générosité, toute l'équipe.

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Re: Benjamin - Written on skin - Benjamin/VC - Philharmonie de Paris - 14/02/2020

Message par HELENE ADAM » 17 févr. 2020, 11:55

Merci jean :wink:

Juste deux mots pour signaler la qualité de ce Festival présence qui comprenait ce "Written on Skin" unanimement salué, beaucoup d'autres manifestations pour les passionnés de musique contemporaine et ce concert de clôture hier 16 février, à l'auditorium de Radio France dont il faut également saluer la qualité (et celle de l'Ensemble Intercontemporain.)

Programme
Bastien David
Urban song pour grand ensemble (co-commande de Radio France / EIC – création mondiale)

Isabel Mundry
Noli me tangere pour percussion et ensemble (commande de Radio France, de l’Ensemble intercontemporain du Collegium Zurich, de Zurich Fabrik (festival Eclat), création mondiale)

George Benjamin
Into the Little Hill, conte lyrique en deux parties pour soprano, contralto et ensemble de quinze musiciens

Samuel Favre percussion
Jennifer France soprano : la Foule, le Narrateur, l'Etranger, l'Enfant du ministre
Helena Rasker mezzo-soprano : la Foule, le Narrateur, le Ministre, la Femme du ministre
Ensemble Intercontemporain
Pierre Bleuse direction

Ce concert sera diffusé le 3 juin sur France Musique.

Quelques remarques rapides :
Deux courts morceaux dont une création de Bastien David, exceptionnelles sensations sonores et lumineuses pour un bref morceau très "visuel" et franchement réussi.
Puis le premier opéra de George Benjamin, "into the little Hill", où l'on voit déjà toutes les qualités du compositeur dans la réalisation d'une oeuvre lyrique : les voix (magnifiques) expriment avec force les sentiments dans le cadre d'un orchestre restreint dont elles sont totalement partie prenante. Les différences de timbre entre la soprano et la mezzo sont extrêmement "parlantes" dans les rôles successifs qu'elles incarnent et la petite histoire vit littéralement devant nous. A noter la présence d'un cymbalum, instrument venu d'Europe centrale (Hongrie en particulier) que vous voyez en photo ci-dessous à gauche.
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Re: Benjamin - Written on skin - Benjamin/VC - Philharmonie de Paris - 14/02/2020

Message par Loïs » 17 févr. 2020, 12:22

HELENE ADAM a écrit :
15 févr. 2020, 15:39
Orchestre sublimé, chef dirigeant son œuvre, interprètes de haut vol, œuvre rare et étonnante, on ressort de tout cela sous le choc !
l'absence de mise en scène ne gênait pas dans une telle oeuvre?

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Re: Benjamin - Written on skin - Benjamin/VC - Philharmonie de Paris - 14/02/2020

Message par HELENE ADAM » 17 févr. 2020, 12:38

La réponse était là ( :wink: )
HELENE ADAM a écrit :
15 févr. 2020, 15:39
La mise en espace proposée sur la scène de la Philharmonie par Dan Ayling, ne remplace pas la mise en scène qui manque un peu, mais elle supplée très avantageusement au côté parfois très artificiel de la simple version concert. Car cette œuvre est un opéra et un opéra comporte du théâtre.
Il valait mieux avoir déjà vu l'oeuvre mise en scène je pense... :wink:
(mais, pour ce genre d'oeuvre, c'est plutôt un public de connaisseurs).

PS : j'en profite pour signaler l'hommage rendu par l'Ensemble Intercontemporain hier à Radio France, à l'altiste Christophe Desjardins mort le 13 février à l'âge de 57 ans et qui en était un membre éminent.
https://www.francemusique.fr/actualite- ... cale-81438
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Re: Benjamin - Written on skin - Benjamin/VC - Philharmonie de Paris - 14/02/2020

Message par srourours » 17 févr. 2020, 14:32

Oui Christophe Desjardins en fût un membre éminent, et plus largement un immense interprète et "passeur" de la musique contemporaine, ce qui permit à son instrument, l'alto, de voir sa littérature s'enrichir considérablement. Pour moi qui ait eu la chance de le voir jouer et de l'accompagner sur scène, son engagement était inouï. Merci Hélène pour ce rappel.

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