Berlioz - La Damnation de Faust - Dutoit/VC - Philharmonie de Paris - 3/02/2019

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Re: Berlioz - La Damnation de Faust - Dutoit/VC - Philharmonie de Paris - 3/02/2019

Message par Ernesto » 03 févr. 2019, 23:11

Un magnifique concert. Trois très grands solistes. John Osborn chante avec un style parfait dans la lignée de Gedda. Son français est excellent. Tout y est; les nuances, le liant de la voix, une technique hors pair. Et cela, malgré les problèmes de santé.J'adore Osborn, c'est dit... Kate Lindsay est une très belle Marguerite. La voix est riche, à la fois capable de douceur et de beaux éclats. le Méphisto de Nahuel Di Piétro est sarcastique, il vit le rôle et la voix convient bien au personnage.
L'orchestre et les choristes ont servi cette Damnation de très grande manière.
J'avais la chance d'être au parterre, l'équilibre voix/orchestre y est réussi. Ce n'est pas le cas suivant le placement, j'en ai fait l'expérience...
Bref une magnifique soirée Berlioz, cent coudées au dessus de Bastille!

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Re: Berlioz - La Damnation de Faust - Dutoit/VC - Philharmonie de Paris - 3/02/2019

Message par MariaStuarda » 04 févr. 2019, 00:09

micaela a écrit :
03 févr. 2019, 22:43
Même impression qu'Hélène pour les voix. Même type de placement (fond de 2ème balcon, côté jardin). (...)
Donc la prochaine saison, saurait on vous conseiller de ne pas reprendre ces places pour les concerts de ce type :wink:

Superbe soirée (et l'occasion de voir les copains).

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Bernard C
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Re: Berlioz - La Damnation de Faust - Dutoit/VC - Philharmonie de Paris - 3/02/2019

Message par Bernard C » 04 févr. 2019, 00:24

Ernesto a dit l'essentiel.

Damnation rare, voire exceptionnelle par la conjonction rêvée offerte ce soir entre un Chef, un orchestre, des chœurs et les solistes au mieux de ce qu'on peut espérer dans le style et l'esprit de l'œuvre.

Entre Spyres et Osborn désormais je ne saurais les départager.
Probablement les deux meilleurs Faust berlioziens du moment .
Si Spyres a certainement un peu plus d'ampleur , tous les deux savent exactement ce que Berlioz veut dire

Osborn y met probablement un peu plus de cœur ce qui donne à ce Faust une intensité , une densité particulière.

Kate Lindsey a maintenu l'auditoire en suspension.
Sur une des œuvres que j'ai le plus entendue ( depuis Boulez à Grenoble en 1968 ) je ne crois pas avoir eu une Marguerite qui ait aussi ciselé, capitonné chaque signifiant de chaque fragment de mot enroulé autour de sa note.
C'est divin, on est emporté plus qu'au fond du langage, comme au fond du personnage , comme au cœur intime de ce que la chanteuse fait vivre d'elle même métamorphosée en Marguerite.
Les timbres de la voix sont tout sauf monochromes , des velours sombres et mystérieusement étouffés aux scalpels acérés puissants très franchement projetés.
La prononciation est parfaite et surtout la scansion des syllabes remarquablement subtile dans le discours musical .
Pensez par exemple au "d'amour" ou au dernier " Hélas" avec ce _é_ qui se prolonge dans le souffle de façon inédite et qui dit la désespérance.

Di Pierro superbe de tempérament , là aussi dans un style qui ne grossit pas exagérément le personnage mais qui met en relief la truculence des chansons , et la merveilleuse mélodie de la sérénade "Voici des roses" dévoile toute la sensibilité et l'art des nuances du chanteur.

Mais tous ces magnifiques chanteurs, y compris Edwin Crossley Mercer dans un bien honorable Brander n'auraient pas pu porter seuls la soirée à l'incandescence sans le chef.

Dutoit a conduit un Berlioz trop rare où il ne confond pas l'éclat des sonorités , la vigueur des modulations , les dynamiques rythmiques ,les aspérités de cette musique avec le colorisme qui l'étouffe , qui veut la rendre jolie alors qu'elle doit sans cesse nous déplacer, nous déranger de notre confort, nous étonner , nous porter ici puis là .
Bref nous faire tenir debout par une émotion de sens en éveil .
Tous les pupitres ont sû répondre à ça avec un talent incroyable, génie de la musique française.
Et les chœurs (et la maîtrise à l'apothéose de Marguerite) ont été admirables de précision , de clarté , d'attaque, d'énergie et d' ordonnancement rythmique.

Soirée d'exception.
Merci

Bernard
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Re: Berlioz - La Damnation de Faust - Dutoit/VC - Philharmonie de Paris - 3/02/2019

Message par enrico75 » 04 févr. 2019, 07:22

Bernard C a écrit :
04 févr. 2019, 00:24
Ernesto a dit l'essentiel.



Kate Lindsey a maintenu l'auditoire en suspension.
Sur une des œuvres que j'ai le plus entendue ( depuis Boulez à Grenoble en 1968 ) je ne crois pas avoir eu une Marguerite qui ait aussi ciselé, capitonné chaque signifiant de chaque fragment de mot enroulé autour de sa note.
C'est divin, on est emporté plus qu'au fond du langage, comme au fond du personnage , comme au cœur intime de ce que la chanteuse fait vivre d'elle même métamorphosée en Marguerite.
Les timbres de la voix sont tout sauf monochromes , des velours sombres et mystérieusement étouffés aux scalpels acérés puissants très franchement projetés.
La prononciation est parfaite et surtout la scansion des syllabes remarquablement subtile dans le discours musical .
Pensez par exemple au "d'amour" ou au dernier " Hélas" avec ce _é_ qui se prolonge dans le souffle de façon inédite et qui dit la désespérance.
Tout à fait d'accord avec ce qui a été dit.
Un seul petit bémol sur Kate Lindsey:
Sa diction française est impeccable sauf les "ai" qui deviennent "a" d'où se lève deviend se lave etc....mais ce n'est qu'un infime détail au cours de sa magnifique prestation ,étant juste en face au 10eme rang j ai pu profité pleinement de son timbre de velours et son interprétation raffinée
Chapeau à J.Osborn qui a assuré vaillamment le rôle de Faust alors qu'il était encore malade le matin même, quel professionalisme et respect du public! On a à peine distingué un effort avec les aigus souvent émis en voix mixte dans le duo avec Marguerite.
Après avoir échangé avec Hélène et d'autres à la sortie il se confirme qu'il faut absolument être au parterre de face à la Philharmonie pour les voix.Par contre les grands tuttis orchestraux avec choeurs sont fabuleusement rendus dans la salle sans aucune saturation du son .quand aux sonneries des portables c'est de pire en pire....
Merveilleuse soirée.

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Re: Berlioz - La Damnation de Faust - Dutoit/VC - Philharmonie de Paris - 3/02/2019

Message par HELENE ADAM » 04 févr. 2019, 08:28

La comparaison entre Osborn et Spyres n'est pas forcément très pertinente. Je ne pense pas que Spyres se risque à chanter à la Philharmonie de Paris pas plus d'ailleurs qu'à Bastille. Les deux ténors n'ont pas les mêmes qualités et Osborn a une projection et une ampleur bien supérieure à mon sens. Rappelons qu'il avait brillamment chanté Benvenuto Cellini du même Berlioz à Bastille.
L'équilibre entre les trois chanteurs était impressionnante et finalement assez rarement obtenue et Di Pierro est un Mefisto d'une grande subtilité.
J'ai déjà dit plus haut comment j'avais toujours apprécié (comme beaucoup d'Odbiens) Kate Lindsey (la Muse et Sesto notamment mais elle était Miranda également à l'OC récemment), sa Marguerite est d'une classe folle, effectivement l'une des plus belles.
Une journaliste qui se trouvait par hasard (généralement ce n'est pas le cas... la presse est bien placée) près de moi et m'a "interviewée" à l'issue du spectacle, s'étonnait qu'on puisse organiser un concert avec voix dans une salle qui comporte autant de places où on entend si mal les chanteurs.
Et même si nous, initiés, les laissons à d'autres, cela ne change rien au scandale de ce que cela représente à mon avis....Rien n'avertit le spectateur du fait qu'il risque de mal entendre. Quant les chanteurs sont placés en haut de l'orchestre, donc au dessus (comme le sont les choeurs) on les entend bien mieux. Certains chefs le font systématiquement (Gergiev, Sokhiev par exemple). Si personne ne proteste contre ces questions d'acoustique, le problème perdurera.
Lui : Que sous mes pieds se déchire la terre ! que sur mon front éclate le tonnerre, je t'aime, Élisabeth ! Le monde est oublié !
Elle : Eh bien ! donc, frappez votre père ! venez, de son meurtre souillé, traîner à l'autel votre mère

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Re: Berlioz - La Damnation de Faust - Dutoit/VC - Philharmonie de Paris - 3/02/2019

Message par Bernard C » 04 févr. 2019, 09:39

Désolé Hélène mais comme j'ai entendu Spyres et Osborn tous les deux dans la Damnation et dans des conditions acoustiques et des placements équivalents tu me permettras de juger mon appréciation plus pertinente que la tienne qui ne fait que supposer.

Bernard
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Re: Berlioz - La Damnation de Faust - Dutoit/VC - Philharmonie de Paris - 3/02/2019

Message par Lucas » 04 févr. 2019, 10:21

HELENE ADAM a écrit :
04 févr. 2019, 08:28
La comparaison entre Osborn et Spyres n'est pas forcément très pertinente. Je ne pense pas que Spyres se risque à chanter à la Philharmonie de Paris pas plus d'ailleurs qu'à Bastille. Les deux ténors n'ont pas les mêmes qualités et Osborn a une projection et une ampleur bien supérieure à mon sens. Rappelons qu'il avait brillamment chanté Benvenuto Cellini du même Berlioz à Bastille.
Hélène, il me semble qui tu fais ici un bel anachronisme musical.

La damnation de Faust a été créée à l'Opéra Comique et la plupart des œuvres de cette époque est conçue pour des théâtre à l'italienne (ou équivalent) qui ont tous une taille humaine.

On se moque donc de savoir si Osborn a une voix plus puissante que Spyres, lui permettant de franchir l'acoustique déplorable de la Philharmonie de Paris. Ce n'est pas ce que voulait Berlioz et ce n'est pas davantage ce que l'amateur d'opéra attend.

En revanche, le volume vocal de Spyres est parfaitement suffisant pour ce répertoire quand on le joue dans les conditions prescrites par le compositeur et sa signature vocale comme son métal assez unique me semblent très supérieurs à Osborn que j'ai, moi aussi, entendu dans Benvenuto Cellini pour le trouver très oubliable.

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Message par HELENE ADAM » 04 févr. 2019, 10:38

Je ne fais aucun anachronisme musical et je n'ai pas plus que toi le culte du décibel mais celui du beau chant donc nous sommes d'accord sur les qualités de Spyres que je n'ai pas mises en cause dans ce rôle (dans d'autres rôles qu'il a entrepris c'est une autre affaire...) mais, désolée et c'était mon propos, Spyres ne chante pas dans le même genre de salle que Osborn ni avec le même genre d'orchestre. Ce qui ne retire rien à ses immenses qualités mais rend peu pertinentes les comparaison...
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Message par Lucas » 04 févr. 2019, 11:11

HELENE ADAM a écrit :
04 févr. 2019, 10:38
Spyres ne chante pas dans le même genre de salle que Osborn ni avec le même genre d'orchestre. Ce qui ne retire rien à ses immenses qualités mais rend peu pertinentes les comparaisons...
Si ce n'est que ton argumentation repose notamment sur le fait qu'Osborn aurait une puissance de feu supérieure à Spyres

Or cet argument ne tient pas puisque leur répertoire commun porte sur des œuvres créées dans des théâtre à l'italienne. Si notre époque tend à privilégier des salles immenses pour des raisons de rentabilité, c'est de notre faute et il serait dommage qu'on exige des chanteurs qu'ils sacrifient leur art (en misant abusivement sur la puissance) sur l'autel de la loi du marché.

En revanche, sur le plan du matériau vocal et de la beauté du timbre, Spyres et Osborn ne boxent pas dans la même catégorie et je préfère mille fois le premier.

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Re: Berlioz - La Damnation de Faust - Dutoit/VC - Philharmonie de Paris - 3/02/2019

Message par HELENE ADAM » 04 févr. 2019, 11:57

À part le dernier paragraphe (sur la beauté respective des timbres) je n'ai pas de désaccord avec ce que tu dis bien au contraire. C'est en effet un non sens de vouloir donner la Ddf à Bastille ou à la PP (encore plus dans cette salle absolument pas faite pour les voix et je ne reproche pas à Spyres de ne pas s'y produire. C'est au contraire la preuve d'une grande sagesse. Mais hier nous parlons d'une version concert dans une salle précise...
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