Verdi - Ernani - Foster/Grinda - Marseille - 06/2018

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Re: Verdi - Ernani - Foster/Grinda - Marseille - 06/2018

Message par HELENE ADAM » 17 juin 2018, 17:34

Parce que hier, pour la dernière, où Tezier a donné AMHA une leçon magistrale de beau chant verdien, l'émotion était perceptible dans la salle, la sienne et la nôtre...
Lui : Que sous mes pieds se déchire la terre ! que sur mon front éclate le tonnerre, je t'aime, Élisabeth ! Le monde est oublié !
Elle : Eh bien ! donc, frappez votre père ! venez, de son meurtre souillé, traîner à l'autel votre mère

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Re: Verdi - Ernani - Foster/Grinda - Marseille - 06/2018

Message par Parisseb » 18 juin 2018, 08:27

Une très bonne distribution ne suffit pas à faire un grand spectacle: je me suis vraiment ennuyé samedi soir (j'y reviendrai)

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Re: Verdi - Ernani - Foster/Grinda - Marseille - 06/2018

Message par HELENE ADAM » 18 juin 2018, 09:17

Soirée du 16 juin 2018
J’avais déjà vue la mise en scène de Grinda par le truchement d’une retransmission depuis l’opéra de Monte Carlo, qui a donné lieu à un DVD (Déjà Tézier et Vinogradov, mais Vargas et Vassililieva).
Elle prend un parti très statique, de "tableaux", jouant sur la beauté des costumes et le positionnement presque figé des chanteurs.
Le procédé récurrent du grand miroir oblique de fond de scène qui reflète les artistes de la scène en les montrant vus par au-dessus, lasse assez rapidement, du fait principalement d’une luminosité du miroir assez agressive, sans que ce soit compensé par un intérêt quelconque à partir du moment où la direction d’acteur prévoit, quant à elle, des mouvements terriblement “attendus”, demandant finalement aux chanteurs de chanter le plus souvent debout face au public. Le ballet est assez ridicule également.
Il y a pourtant de belles images essentiellement sous la forme de ces “tableaux” de foules dont on devine les silhouettes derrière un fin rideau avec jeux subtils de lumière mais rien ne retient longtemps l’attention, sans les voix, ce serait souvent l’ennui et pour tout arranger, les chanteurs souffrent manifestement de la chaleur dans d’aussi lourds costumes, qui, même pour respecter l’époque, n’ont pas besoin d’être aussi “chauds”.
La direction musicale de Lawrence Foster, à l’inverse de cette mise en scène assez lourde, est aérée, vive et rafraichissante, et donne du bien beau Verdi, attentive à ses instruments comme à ses chanteurs qu’il couve en permanence d’un regard précis. Magnifique solo de harpe accompagnant Ernani par exemple.
Les chœurs, masculins notamment, sont une des grandes forces de cette représentation tout comme d’ailleurs les rôles secondaires, très bien chantés de Don Riccardo par un Christophe Berry à la voix claire et bien projetée, qu’on remarque immédiatement par sa présence sur scène, tout comme la belle basse d’ Antoine Garcin pour Jago.
Mais l'ensemble est surtout dominé par un duo de voix magnifiques, celle du baryton et de la basse, les deux “clé de fa” (de leurs portées...) Ludovic Tézier et Alexander Vinogradov, tous deux stars de la soirée d’ailleurs, à juste titre.
Ludovic Tézier est au sommet de son art du chant verdien : il est capable de donner mille couleurs différentes à sa voix, selon les airs et l’expression qu’il veut transmettre : héroïsme, colère, virilité, tendresse, regret, nostalgie. A ce niveau de beauté du timbre de précision du phrasé et de la diction italienne, on est déjà sur l’Olympe surtout quand se rajoute ce beau legato dont il a le secret et qui donne toujours l’impression que sa voix danse en chantant. Et le baryton français que j’ai désormais vu dans des dizaines de salles et de rôles avec de plus en plus de plaisir, incarne à présent ce Don Carlo avec une force de conviction qui égale son Posa ou cet autre Don Carlo, celui de la Forza où il me laissera pour toujours un souvenir impérissable.

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On lui reproche parfois son immobilisme sur scène, c’est moins gênant dans ce rôle « majestueux » mais on regrette un peu quand même que la mise en scène ne le pousse guère à exprimer les colères de son personnage autrement que par sa voix et son expression faciale.
Mais la surprise pour beaucoup de spectateurs venus, notamment, pour entendre Tézier dans un de ses plus beaux rôles, a été l’incroyable Silva de Vinogradov. J’avais déjà vanté les mérites de la basse russe depuis que je l’avais découvert dans les deux opéras de Rachmaninoff donnés à la suite l’un de l’autre : Aleko et Francesca da Rimini. Davantage de spectateurs l’ont récemment découvert dans le Luisa Miller retransmis en direct du MET, avec Placido Domingo et Sonya Yoncheva où il incarnait déjà un conte Walter remarqué.
Hier soir il était Silva avec tous ses aspects contradictoires, son amour sincère pour Elvira, son sens de l’honneur, son respect pour le roi malgré la situation,
Là aussi le timbre est magnifique et la technique du chant verdien de haute volée. Mais outre la noblesse de la voix, il surprend par son aisance sur scène et sa faculté à exprimer par gestes simples et naturels, les affres du pauvre Silva. Le charisme des deux artistes domine la scène, rend la performance exceptionnelle mais souligne aussi les difficultés pour les deux autres rôles à se hisser à un niveau comparable.
On redescend en effet d’un cran avec l’Ernani de Francesco Meli. Le ténor italien a pour lui une présence sur scène qui ne laisse pas indifférent mais souvent insatisfait. Il est incontestablement engagé dans un rôle qu’il essaye de servir au mieux mais parait toujours en deçà de ce que l’on attend d’un Ernani charismatique qui devrait largement « marquer » le plateau de sa présence. Or dès qu’apparaissent Silva et/ou le roi, Ernani semble disparaitre tant on cesse de se concentrer immédiatement sur lui. Quand il est seul on s’ennuie un peu. Le chant ne démérite pas non plus mais reste un peu fade, un peu uniforme malgré les nuances très jolies dont il est capable et le timbre manque singulièrement de couleurs surtout pour un ténor formé à l’école italienne. On rêve d’y voir plutôt un Grigolo avec ses excès, avec sa fougue, avec sa passion, qui correspondrait tellement mieux à l’idée qu’on se fait d’Ernani. Même si Méli, incontestablement, a une belle technique, supérieure à celle de son prédécesseur dans cette mise en scène, Ramon Vargas.

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Là où le bât blesse sérieusement, à mon sens, c’est avec l’Elvira de Hui He. Engagée elle l’est également, mais la voix ne suit pas. Trop lourde la plupart du temps pour évoquer la jeune fille prise entre son devoir et ses amours, le timbre n’est plus très beau, quelques fausses notes trahissent des difficultés techniques sans doute récurrentes, et globalement le couple ne fonctionne pas très bien et ne nous donne pas un très beau chant.
La soirée restera donc essentiellement marquée par le beau duo masculin, sans parvenir à emporter une adhésion totale et permanente, la mise en scène, la faiblesse de la direction d’acteurs, plombant quand même largement tout caractère épique et héroïque qu’on attend dans cet opéra.
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Re: Verdi - Ernani - Foster/Grinda - Marseille - 06/2018

Message par Parisseb » 18 juin 2018, 17:22

Retour en quelques mots sur la soirée du 16 juin.

J'avais vu à Liège en 2015 cette production qui m'avait déjà paru bien faiblarde: le fait est que je l'ai trouvé encore plus mauvaise - je pèse mes mots - à Marseille.
La plus grande partie du spectacle se résume à deux, trois voire quatre chanteurs qui se tournent autour, sur un plateau vide, dans des postures convenues. C'était franchement pathétique et j'ai eu honte d'emmener un ami qui découvrait l'opéra et qui a trouvé cela statique. Ajouté à cela une histoire vraiment faiblarde, sans cohérence dramatique (plus une salle surchauffée: j'avais la tête farcie avant l'entracte): on obtient un ennui certain.

Alors certes la distribution est de très bon niveau (et c'est ce qui m'avait fait venir).
Grand gagnant à l applaudimètre - devant l'enfant du pays - A. Vinogradov, basse pour ma part découverte à Valence lors d'une somptueuse interprétation de Procida dans les vêpres siciliennes, confirme à Marseille son immense talent. Ligne de chant, souffle, graves profonds, retenue et dignité dans l'interprétation: on tient là une basse qui va assurément marquer le circuit lyrique dans les années à venir.
Ludovic Tezier campe lui un Carlo certes impérial avec les qualités qu'on lui connait de parfait baryton verdien mais son interprétation n'a pas complètement réussi à m'émouvoir (notamment à l'acte 3 où je l'ai trouvé extérieur dans son grand air, alors que le personnage est traversé d'une profonde réflexion - la seule de tout l'opéra - sur le sens de son existence).
Appréciation plutôt positive du ténor Francesco Meli: la voix est très sonore et claironnante et il prend le rôle à bras le corps. Mais cet engagement total , toujours forte malgré quelques tentatives d'allègement, finit lui aussi par ennuyer (et la mise en scène n'engage rien).
Hui He ne démérite pas, je m'attendais à une catastrophe qui objectivement n'a pas eu lieu et c'est tant mieux. Mais la voix est souvent forcée dans les aigus. L'interprète est pataude et se sent obligé de serrer le points pour passer les vocalises de son air d'entrée.
Rien à redire côté orchestre.

Au final, une soirée mitigée me concernant.
J'aurai préféré voir l’œuvre en version de concert - ça aurait moins indigeste - ou alors que l'opéra de Marseille qui réunissait une distribution de très haut niveau la programme sur une œuvre plus charpentée dramatiquement.

Sébastien.

PS1: Public manifestement ravi, et pourtant au restaurant après le spectacle, le couple - d'un certain âge - assis à la table à côté de moi a trouvé - je cite - "chiant".
PS2: Au dernière acte, le voile blanc étoilé tendu à Liège (je suis presque sur qu'il y était) ne figurait pas à Marseille (toujours ce fichu miroir). Modification entre les deux séries? Drap déchiré? technicien ayant fait une grosse tâche de sauce tomate? Mystère...
Pour autant, pas d’annonce de grève samedi soir, les épées et le cor étaient là et l'éclairage aussi.

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Re: Verdi - Ernani - Foster/Grinda - Marseille - 06/2018

Message par HELENE ADAM » 18 juin 2018, 17:57

Parisseb a écrit :
18 juin 2018, 17:22
PS2: Au dernière acte, le voile blanc étoilé tendu à Liège (je suis presque sur qu'il y était) ne figurait pas à Marseille (toujours ce fichu miroir). Modification entre les deux séries? Drap déchiré? technicien ayant fait une grosse tâche de sauce tomate? Mystère...
Pour autant, pas d’annonce de grève samedi soir, les épées et le cor étaient là et l'éclairage aussi.
Au dernier acte, autant que je me souvienne, le miroir remonte un peu, sans disparaitre pour autant, et laisse une grande trouée noire et étoilée en fond de scène. Y avait-il autre chose à Liège ?

PS : les accessoires étaient là et Vinogadov s'était définitivement débarrassé de sa perruque et de ses fausses moustaches.... :wink:
Lui : Que sous mes pieds se déchire la terre ! que sur mon front éclate le tonnerre, je t'aime, Élisabeth ! Le monde est oublié !
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Re: Verdi - Ernani - Foster/Grinda - Marseille - 06/2018

Message par Efemere » 18 juin 2018, 23:49

À Liège :

2015_Liège_"Ernani"_Screenshot.png
2015_Liège_"Ernani"_Screenshot.png (191.17 Kio) Vu 2581 fois
[Source : ici]

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Message par HELENE ADAM » 19 juin 2018, 08:25

Efemere a écrit :
18 juin 2018, 23:49
À Liège :


2015_Liège_"Ernani"_Screenshot.png
[Source : ici]
Merci :D
Alors, en effet, ce n'était pas cela à Marseille..
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Re: Verdi - Ernani - Foster/Grinda - Marseille - 06/2018

Message par Parisseb » 19 juin 2018, 08:29

Merci pour la photo; il y a donc bien eu une modification du décor au dernier acte entre la version présentée à Liège et celle à Marseille: du très peu, on est passé au néant.

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Re: Verdi - Ernani - Foster/Grinda - Marseille - 06/2018

Message par Epsilon » 19 juin 2018, 09:53

Parisseb a écrit :
19 juin 2018, 08:29
Merci pour la photo; il y a donc bien eu une modification du décor au dernier acte entre la version présentée à Liège et celle à Marseille: du très peu, on est passé au néant.
Mais on peut complètement s’en ficher : Musicalement, c’était si beau que, pas le quart de la moitié d’un centième de seconde, je n’ai pensé à autre chose qu’à savourer...

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Re: Verdi - Ernani - Foster/Grinda - Marseille - 06/2018

Message par fomalhaut » 19 juin 2018, 09:57

Epsilon a écrit :
19 juin 2018, 09:53
Parisseb a écrit :
19 juin 2018, 08:29
Merci pour la photo; il y a donc bien eu une modification du décor au dernier acte entre la version présentée à Liège et celle à Marseille: du très peu, on est passé au néant.
Mais on peut complètement s’en ficher : Musicalement, c’était si beau que, pas le quart de la moitié d’un centième de seconde, je n’ai pensé à autre chose qu’à savourer...
Tout à fait !

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