Rossini - Semiramide - Mariotti/Alden - Munich - 07/2017

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Luc ROGER
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Re: Rossini - Semiramide - Mariotti/Alden - Munich - 02/2017

Message par Luc ROGER » 14 févr. 2017, 10:06

Une grande réussite musicale

Si la soirée est une réussite, c'est que la musique et le chant ont transcendé les faiblesses d'une mise en scène insipide, et de combien! et c'est que de grands chanteurs et chanteuses sont parvenus à incarner avec une force théâtrale extraordinaire tout ce que la mise en scène n'est pas parvenu à communiquer. L'orchestre entraîné par la magie de la direction précise et intelligente de Michelle Mariotti a fait ruisseler la musique de Rossini dans des chatoiements lumineux subjuguants. On est aux anges. Michelle Mariotti, un enfant de Pesaro tout comme Rossini, a été nourri dès le berceau de la substantifique moelle du compositeur: né dans une famille de musiciens, avec un père, Gianfranco, superintendant du Festival Rossini. Dès son plus jeune âge, il a côtoyé Riccardo Chailly, Claudio Abbado, Daniele Gatti, parmi d'autres. Il assistait aux répétitions dans leurs jambes, értait aux premières loges aux concerts. Mariotti connaissait le répertoire avant même d'entrer au Conservatoire et s'est nourri de l'observation de ces grands chefs. Et cette alchimie de la formation donne aujourd'hui une direction aimante, chaleureuse, attentive et concentrée. Il suffit lors de l'ouverture d'écouter comment il ralentit encore certains passages plus lents en les rendant presque sotto voce, comme un murmure tout en détachant tous les sons avec douceur et délicatesse. Et plus que tout encore, Mariotti a un sens consommé du rythme rossinien dans les complexités de son élaboration. C'est la première fois qu'il dirige l'opéra en entier (-ou presque en entier, la version munichoise donnant trois heures trente des quatre de la partition complète). Les choeurs, entraînés par Stellario Fagone, sont à l'aune des remarquables qualités de l'orchestre.

Joyce DiDonato, dont on connaissait déjà les interprétations magistrales des grands airs de Semiramide en récital, dont le "Bel raggio lusinghier", réussit avec maestria sa prise de rôle à Munich. La chanteuse a attendu d'atteindre la maturité vocale nécessaire pour ce rôle exigeant, après avoir donné une Elena de haut vol dans la Donna del lago du Met en 2015, un rôle qu'elle chante depuis 2010. On voir le chemin parcouru depuis son Angelina d'il y a une quinzaine d'années. En Semiramide, elle incarne de façon brûlante toutes les facettes d'un personnage complexe, torturé et pervers, hanté par une volonté de puissance paroxystique, mais aussi femme désirante chez qui, enfin, réapparaît comme en rédemption le sentiment maternel qu'il lui avait fallu étouffer. La remarquable composition théâtrale du personnage est l'aune d'un travail vocal qui détaille toutes les nuances du chant rossinien, de la douceur mélodieuse presque susurrée du pianissimo aux envolées pyrotechniques de la colère. Ses ornementations sont confondantes de beauté et de précision.

Tout aussi remarquable, Alex Esposito, dont on a pu souvent apprécié le Leporello à Munich, donne une interprétation d'une grande intensité dramatique d'un Assur prêt aux pires infamies pour s'assurer le pouvoir. Esposito excelle ici dans l'expression du maléfique avec son magnifique baryton basse, une voix dont la puissance sonore se joue de celle de l'orchestre. Daniela Barcellona, une grande chanteuse rossinienne qui avait fait ses débuts à Pesaro, n'a sans doute pas l'impressionnante puissance des deux précédents, ce qu'elle compense aisément par l'élégance et l'agilité de son colorature et des ses vocalises; sa haute stature et la vaste étendue de son mezzo lui permettent de relever sans problème le défi du rôle de travesti qu'est Arsace, avec des descentes d'octaves acrobatiques. Daniela Barcellona ravit par sa technique éprouvée de la vocalise rossinienne avec une maîtrise parfaite de la respiration en terme de durée et des montées et descentes à intervalles très larges.Un art que l'on retrouve tout aussi consommé chez Laurence Brownlee qui donne un très séduisant Idreno avec un ténor métallique de jeune premier, un rôle plus ingénu qui apporte un peu de fraîcheur dans le monde pestilentiel de la cour babylonienne. Enfin, le baryton-basse Simone Alberghini avec sa voix volumineuse et fort bien calibrée, a des profondeurs d'oracle et un timbre hypnotisant qui conviennent bien au personnage.

Staatsoper.TV

Toutes les représentations de la série se jouent à guichets fermés, sauf revente de dernière minute. On pourra cependant voir ce spectacle via la tv internet (Staatsoper.TV) du Bayerische Staatsoper le 26 février à 17 heures.

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Re: Rossini - Semiramide - Mariotti/Alden - Munich - 02/2017

Message par Luc ROGER » 14 févr. 2017, 10:07

Image

Joyce DiDonato et Daniela Barcellona, une photo de Wilfried Hösl

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Re: Rossini - Semiramide - Mariotti/Alden - Munich - 02/2017

Message par beckmesser » 14 févr. 2017, 10:16

Qui est ce JDD que vous évoquez pour le ROH ?

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Re: Rossini - Semiramide - Mariotti/Alden - Munich - 02/2017

Message par Adalbéron » 14 févr. 2017, 11:22

beckmesser a écrit :
14 févr. 2017, 10:16
Qui est ce JDD que vous évoquez pour le ROH ?
Joyce DiDonato.
« Life’s but a walking shadow, a poor player / That struts and frets his hour upon the stage / And then is heard no more. It is a tale / Told by an idiot, full of sound and fury, / Signifying nothing. »
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Re: Rossini - Semiramide - Mariotti/Alden - Munich - 02/2017

Message par HELENE ADAM » 14 févr. 2017, 18:43

Je sais, je me répète mais je vous conseille vraiment l'écoute radio, vocalement c'est quand même drôlement équilibré et Mariotti nous dirige ça de main de maestro Rossinien. On pouvait sans doute espérer davantage de vocalises chez JDD, Esposito ou Barcelona, (Brownlee m'a semblé parfait...) mais l'engagement, le timbre, l'interprétation, sont globalement sacrément agréables à écouter (et à réécouter... :wink: )
Lui : Que sous mes pieds se déchire la terre ! que sur mon front éclate le tonnerre, je t'aime, Élisabeth ! Le monde est oublié !
Elle : Eh bien ! donc, frappez votre père ! venez, de son meurtre souillé, traîner à l'autel votre mère

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Re: Rossini - Semiramide - Mariotti/Alden - Munich - 02/2017

Message par jerome » 14 févr. 2017, 20:27

déjà faire scrupuleusement toutes les notes écrites, ça aurait été déjà formidable! Puis ensuite dans les reprises, varier vraiment, ça aurait été génial.

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Message par Remigio2 » 14 févr. 2017, 20:49

Hiero von Stierkopf a écrit :
13 févr. 2017, 20:09
Y a-t-il des coupures notables ?
Oui, le premier air d'Idreno, coupé alors que les répétitions étaient pas mal avancées visiblement, au grand désespoir de Brownlee :2guns:

R.
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Re: Rossini - Semiramide - Mariotti/Alden - Munich - 02/2017

Message par Remigio2 » 14 févr. 2017, 20:58

jerome a écrit :
13 févr. 2017, 22:56
En revanche, très belle direction de Mariotti.
Effectivement, l'écoute de l'enregistrement radio permet de distinguer des nuances et des raffinements dans la direction de Mariotti qui m'avaient échappés depuis ma "modeste" place au second balcon. Conclusion: la prochaine fois, je reste chez moi dans mon canapé. :cry:

R.
"Qu'on parle de vous, c'est affreux. Mais il y a pire : c'est qu'on n'en parle pas !" Oscar Wilde

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Re: Rossini - Semiramide - Mariotti/Alden - Munich - 02/2017

Message par Hiero von Stierkopf » 14 févr. 2017, 21:00

Remigio2 a écrit :
14 févr. 2017, 20:49
Hiero von Stierkopf a écrit :
13 févr. 2017, 20:09
Y a-t-il des coupures notables ?
Oui, le premier air d'Idreno, coupé alors que les répétitions étaient pas mal avancées visiblement, au grand désespoir de Brownlee :2guns:

R.
Got verdammi noch e mol !

Y a-t-il une motivation particulière à couper cet air ?
Je me souviens que Pido l'avait aussi fait sauter au TCE il y a 2 ou 3 ans.
Comment ça, merde alors ?! But alors you are French !

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Re: Rossini - Semiramide - Mariotti/Alden - Munich - 02/2017

Message par Luc ROGER » 14 févr. 2017, 21:34

D'autant plus dommage que Brownlee chante Rossini dans la meilleure tradition, comme Rockwell Blake le faisait p.ex.

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