PlacidoCarrerotti a écrit :
Ben non. D’après le conférencier d’hier, le Faust de Goethe est d’abord un scientifique
Je n'ai pas assisté à cette conférence mais à l'époque de Faust il n'y a pas de distinction entre philosophie et science. Le Faust de Goethe embrasse toutes les disciplines de son temps, qu'il énumère dans son monologue initial. C'est le dégoût devant les limites de l'esprit humain qui le pousse au suicide, dont le détourneront les chants de Pâques, non par leur contenu religieux mais parce qu'ils lui rappellent l'innocence perdue de l'enfance.
PlacidoCarrerotti a écrit :
Toujours selon le conférencier, Faust 2 est un grand voyageur : il va même jusque dans l’Antiquité rencontrer Hélène de Troie.
Ce n'est pas à l'épisode d'Hélène de Troie que j'ai pensé mais à la fin de Faust 2, quand Faust entreprend de faire élever des digues pour gagner sur la mer des terres à cultiver, ce qui pourrait s'apparenter à la colonisation d'une autre planète. Ce projet est d'ailleurs illusoire puisque quand Faust devenu aveugle croit entendre les ouvriers y travailler, c'est en fait sa propre tombe qu'ils sont en train de creuser. Où on pourrait retrouver l'impression d'illusion et d'échec du projet Mars ressentie par certains à la fin du spectacle.
Je ne sais pas du tout si Hermanis a pensé à cette fin du Faust 2. De toutes façons le Faust de Berlioz ne s'inspire que du Faust 1, et encore, de très loin, en reprenant surtout la traduction par Nerval des chansons (Brander et Mephisto dans la taverne, la ballade du roi de Thulé) mais en transformant beaucoup les personnages de Faust, réduit à une figure romantico-neurasthénique, et de Méphisto qui se présente comme "l'esprit de vie" et non "l'esprit qui toujours nie", en déplaçant le moment et changeant complètement le sens du pacte, qui chez Goethe est un pari (Faust parie que jamais Méphisto ne parviendra à satisfaire son désir, de connaissance, de jouissance, d'action). Le seul élément emprunté par Berlioz au Faust 2 est l'apothéose finale de Marguerite, préfigurée à la fin du Faust 1 par la "voix d'en haut" annonçant qu'elle est "sauvée". Apothéose absente visuellement dans la mise en scène d'Hermanis.
Sur l'interprétation de cette mise en scène beaucoup d'hypothèses ont été avancées ici (brillantes analyses de Val et Wababelooba notamment), beaucoup de critiques émises. On a un peu l'impression d'une auberge espagnole (ou lettonne en l'occurrence) où chacun trouve ce qu'il y apporte ou ce qu'il a envie d'y trouver, en fonction de son expérience, de sa sensibilité, de ses connaisances et de ses goûts.