Orff :Carmina Burana-Dubor/Siècles romantiques-Lyon-06/2015

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petitchoeur
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Orff :Carmina Burana-Dubor/Siècles romantiques-Lyon-06/2015

Message par petitchoeur » 28 juin 2015, 22:48


Carl Orff (1895-1982) Carmina Burana (1937)

Fabrice Boulanger et Marieke Hofmann, pianos

Hélène Colombotti, Gisèle David, Martin Malatray, Laurent Mariusse, Romeo Monteiro, percussions

Claire-Adeline Puvilland, soprano
Alice Didier, mezzo-soprano
Karl Laquit, ténor
Marcin Habela, Bardassar Ohanian, barytons

Les Siècles Romantiques
Direction : Jean-Philippe Dubor

Chapelle de la Trinité à Lyon le 17 juin 2015.

Chef d’orchestre d’abord puis compositeur, il met au point la « méthode Orff » d’apprentissage de la musique par le rythme à l’aide de petites percussions, qui sera enseignée dans la Guntherschule fondée avec Dorothée Gunther en 1925. Méthode proposant une alternative au solfège traditionnel pour les enfants. Découvrant dans les années 30 les grands maîtres du XVIème siècle, il en dégage sa conception d’une musique revenant aux « sources primitives ». Il remporte son premier succès en 1937 avec les Carmina Burana dans l’Allemagne du IIIème Reich qui se reconnaît dans cette musique à l’écriture rythmée et même martelée. Peu de mélodies, des textes chantés/parlés recto tono, peu ou pas d’instruments à cordes, beaucoup de percussions. Son succès est dû à cette simplicité et au génie d’Orff à la mettre en œuvre. Il est un des musiciens officiels du régime pour son exaltation de la force collective. Il continuera dans la même veine après la guerre s’inspirant plutôt de la mythologie grecque (Antigone, Œdipe Rex…).

L’écriture des Carmina Burana date des XIème/XIIIème siècles. C’est un ensemble de 200 pièces environ en vers et en chansons surtout profanes et de langues variées (bas-latin, dialectes allemands, ancien français). De ton très libre et audacieux, critiquant volontiers les grands de ce monde, particulièrement le Pape et la curie romaine, parodiant dans un style ordurier, ils chantent aussi la poésie d’amour la plus délicate. René Clemencic en a réalisé au XXème siècle une édition critique remarquable restituant cette ambiance de troubadours ou de « goliards », ces clercs itinérants qui allaient de ville en ville en improvisant sur les problèmes de l’époque.

Orff sélectionne quelques textes, surtout érotiques et satiriques, des Carmina Burana et modifie fortement les motifs musicaux du XIIIème siècle . Ou il les accompagne d’éléments totalement nouveaux dans un style « néo-païen » bien en phase avec le nazisme. Devant le succès de son œuvre réclamant un grand orchestre, il en réalise une version simplifiée pour deux pianos, des timbales et des percussions la rendant jouable par des formations aux moyens limités. C’est cette version qui est proposée ce soir.

Trois tableaux (I Primo Vere, In Taberna, cour d’Amours) encadrés par un grand chœur invoquant la Fortuna Imperatrix Mundi qui préside à la destinée de l’homme. C’est un jaillissement d’énergie qui frise souvent la raideur. Mais la puissance qui se dégage de l’œuvre explique son succès. Puissance que Jean-Philippe Dubor, son choeur et son orchestre des Siècles Romantiques ont su traduire à la perfection dans le cadre d’une chapelle en opposition stylistique complète à l’œuvre d’Orff par son décor baroque, tout en couleurs, courbes, contre-courbes et trompes-l’œil. Le chœur se révèle d’une puissance (les hommes surtout fortement sollicités) formidable, d’une rigueur métronomique, d’une grande musicalité dans les parties PPP (belles voix d’altos).
Chœur soutenu par les percussions et les deux pianos aux mêmes qualités. Jean-Philippe Dubor, dont le geste est d’une précision impressionnante, dirige sans aucune distraction, sans aucun décalage : une exécution parfaite ! Bien servie par Claire-Adeline Puvilland, soprano à la voix claire, fine et très juste, d’Alice Didier, mezzo au timbre séduisant, Karl Laquit, ténor à la voix bien projetée et par les deux excellents barytons: Marcin Habela et Bardassar Ohanian.

Grand succès avec deux bis extraits des Carmina Burana (mais que chanter d’autre après un tel déferlement ?). Belle fin de saison pour la Chapelle de la Trinité.

Pierre Tricou

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