Page 16 sur 28

Re: Chausson - Le Roi Arthus - Jordan/Vick - ONP - 05-06/201

Posté : 26 mai 2015, 05:47
par Efemere
Représentation du 25 mai :

Ouch, heureusement que j'étais prévenue – comme tous mes voisins de la soirée, pour ce qui était de la mise en scène :?. (Moi aussi, j'aurais presque préféré l'esthétique du médiéval hollywoodien de « Knights of the Round Table » (1953) ou de « Sword of Lancelot » (1963) :mrgreen:). D'autre part, à priori, je n'étais pas contre à ce que l'on désacralise le mythe arthurien, mais, pour moi, dans une approche, si possible pas moche esthétiquement parlant et qui permette de comprendre les enjeux de l'ouvrage ; là, je n'ai pu percevoir qu'une espèce de drame « bourgeois-plouc », teinté de valeurs épiques/héroïques arrivant comme un cheveu sur la soupe.

En ce qui me concerne, la laideur visuelle et le manque de subtilité n'ont pas pris le dessus. J'ai pu passer une bonne soirée grâce à la musique et aux interprètes, très inspirés, qui sont parvenus, par leurs belles prestations vocales et dramatiques, à me faire intéresser à la progression du récit – malgré un livret faiblard ; comme si l'orchestre et les chanteurs s'étaient affranchis de la scénographie et de la direction d'acteur pas folichonne, pour offrir intensité et émotion.

La salle était quasi-comble. Quelques départs de spectateurs (plutôt âgés) aux deux entractes. Les artistes ont été très applaudis. :thumbdown: à ceux ayant décidé de baisser le rideau alors que les chanteurs et P. Jordan allaient de nouveau avancer sur le devant de la scène ; ils ont dû traverser le rideau pour se montrer au public une dernière fois. Pour une fois, les musiciens sont restés jusqu'à l'ultime fermeture du rideau.

Re: Chausson - Le Roi Arthus - Jordan/Vick - ONP - 05-06/201

Posté : 26 mai 2015, 10:14
par jmc
Perception totalement différente hier soir :thumbup1: par rapport à la première :thumbdown: .
Bien meilleur équilibre :sweatdrop: entre fosse et plateau. L'enthousiasme de Philippe Jordan :heart: fait plaisir à voir et à entendre.
Lancelot et Genièvre sont maintenant complices :thumbup: et leurs gestes ne sont plus ni maladroits ni obscènes. Quelques moments touchants même :thumbsup: .
Depuis le parterre la scénographie est moins choquante.
Sauf le dernier acte qui reste très laid :cry: et comporte des longueurs.
Cette fois la complainte du laboureur m'a paru plus banale :tears: .
Bravo à Sophie Koch :P et Roberto Alagna.

Re: Chausson - Le Roi Arthus - Jordan/Vick - ONP - 05-06/201

Posté : 26 mai 2015, 10:47
par muriel
Public effectivement très concentré les 19 et 22 mai.
Pas de toux car pas d'ennui.
En revanche, beaucoup de places vides.

Pour la mise en scène, j'ai pensé à Ibsen... ça va bien avec Ikea.

J'aurais tellement aimé un drame romantique en costumes comme la Donna del Lago.
Sophie Koch était , parait-il, assez mécontente de la mise en scène. Entre les roulades dans les fleurs et les acrobaties sur le canapé, elle n'est pas très gâtée.

Re: Chausson - Le Roi Arthus - Jordan/Vick - ONP - 05-06/201

Posté : 26 mai 2015, 10:51
par muriel
JdeB a écrit :hier, les descendants de Chausson étaient dans la salle
j'étais assis à côté de son arrière arrière petite fille au second balcon.
jeune femme cultivée, passionnée et fière.
je lui ai suggéré d'aller voir Philippe Jordan à la sortie, ça lui ferait plaisir de rencontrer la famille.
aussi pour rendre hommage à Amin Jordan.

Re: Chausson - Le Roi Arthus - Jordan/Vick - ONP - 05-06/201

Posté : 26 mai 2015, 13:07
par Schwannhilde
J’étais à la représentation du 25 mai et en suis sortie comme Merlin : enchantée.
L’orchestre et la direction de Philippe Jordan : très très bien.
Les voix étaient magnifiques, avec un bémol pour Thomas Hampson (pas de ligne de chant surtout à l’acte I, voix certes puissante mais qui a beaucoup vieilli), qui s’est amélioré au fil des actes. Je ne lui en veux pas car cela cadrait finalement assez bien avec ce qui arrive à ce pauvre Arthus.
Roberto Alagna : alors là, j’ai été transportée. J’ai tout aimé : sa voix, son jeu. Et quelle diction remarquable, le seul (avec Stanislas de Barbeyrac) pour lequel les surtitres sont superflus. Je l'ai trouvé parfait.
J’ai bien sûr apprécié Sophie Koch mais regretté le déséquilibre du duo du premier acte, où sa voix était souvent couverte par celle du ténor, et sa prononciation pas toujours compréhensible. Sa mort de Genièvre est magnifique, les sons qu’elle émet sont tout à fait pertinents dans ce suicide improbable qui pourrait vite tourner au ridicule.
Stanislas de Barbeyrac (Lyonnel) avait peut-être la plus belle voix de la soirée. Et lui aussi, une diction impeccable. Le laboureur Cyrille Dubois et Peter Sidhom m'ont également beaucoup plu, Alexandre Duhamel bien moins.
Au début de l'acte I, la tonitruance des choeurs m'a dérangée et puis... J'en viens à la mise en scène. Contrairement à ce qui a été écrit ici et ailleurs, je ne pense pas que ce décor très laid et cheap correspond à une désacralisation du domaine et des valeurs d'Arthus, avec une destruction progressive. Pour moi, quand l'opéra commence, on est déjà bien avancé dans cette chute des valeurs et de la culture, et le bungalow et le décor sont le domaine exclusif de Lancelot et Genièvre, et de la bande d'antifas et de zadistes qui erre vainement sur le plateau. Et je comprends le parti pris de cette médiocrité, de cette laideur. Le refus des valeurs qui structurait cette société et son remplacement par rien. Arthus est le seul à lire encore (il vient chercher un livre dans le bungalow et le lit ostensiblement), Lancelot et Genièvre se contentent de jeter les livres au sol, leur donner des coups. Le brûlage du canapé, degré zéro de l'expression pour un être humain, est pour moi celui des voitures en banlieue. Les choeurs chantant trop fort tout le temps - je suis sûre que c'est voulu - m'évoquaient la perte des codes sociaux et culturels (hurlements dans un téléphone portable dans le métro par exemple).
Le parallèle avec notre époque m'a frappée, de nombreuses phrases du livret m'ont fait un effet saisissant d'actualité : " Aveugles que nous sommes, nous avons trop compté sur la vertu des hommes "...
Donc, pour moi, la dégradation du bungalow est celle de la nouvelle société de Lancelot et Genièvre, pas celle d'Arthus du tout. Et dans ce cas, beaucoup d'éléments sont bien vus. Là, je suis obligée de m’autocensurer pour éviter aux administrateurs de recevoir des demandes d'effacement de ce message. Nous assistons actuellement à un phénomène identique à celui qui est représenté dans cet opéra.
C'est pour moi une oeuvre importante de la musique française. Etant très sensible au sort des Wotan et Arthus, j'ai été impressionnée par cette représentation. J'aurais encore beaucoup à en dire...

PS : je pense maintenant que Roberto Alagna peut devenir un Lohengrin très intéressant, et même encore plus que cela.

Re: Chausson - Le Roi Arthus - Jordan/Vick - ONP - 05-06/201

Posté : 26 mai 2015, 13:24
par Schwannhilde
Et bien sûr, le lien entre la colline verte au sommet de laquelle se trouve la tour d'Arthus et la colline verte de Bayreuth.

Re: Chausson - Le Roi Arthus - Jordan/Vick - ONP - 05-06/201

Posté : 26 mai 2015, 13:52
par JdeB
Schwannhilde a écrit : Le parallèle avec notre époque m'a frappée, de nombreuses phrases du livret m'ont fait un effet saisissant d'actualité : " Aveugles que nous sommes, nous avons trop compté sur la vertu des hommes "...
je trouve au contraire qu'il s'agit de la phrase la plus intemporelle qui soit, valable pour toutes les époques, toutes les civilisations, toutes les sphères de la société, non ?

Re: Chausson - Le Roi Arthus - Jordan/Vick - ONP - 05-06/201

Posté : 26 mai 2015, 13:56
par Schwannhilde
JdeB a écrit :
Schwannhilde a écrit : Le parallèle avec notre époque m'a frappée, de nombreuses phrases du livret m'ont fait un effet saisissant d'actualité : " Aveugles que nous sommes, nous avons trop compté sur la vertu des hommes "...
je trouve au contraire qu'il s'agit de la phrase la plus intemporelle qui soit, valable pour toutes les époques, toutes les civilisations, toutes les sphères de la société, non ?
Je me réfère à la période vécue depuis ma naissance (mais il y en a d'autres avant). Je trouve que cela n'aurait aucun impact dans les années 80 ou 90 alors qu'aujourd'hui, je ressens dans ma vie de tous les jours et dans mon métier l'imminence de ce ragnarok.

Re: Chausson - Le Roi Arthus - Jordan/Vick - ONP - 05-06/201

Posté : 26 mai 2015, 20:53
par Schwannhilde
Plus j'y pense, plus je me dis que Roberto Alagna pourrait me faire beaucoup d'effet en Lohengrin. Un rôle de ténor brun wagnérien...

Re: Chausson - Le Roi Arthus - Jordan/Vick - ONP - 05-06/201

Posté : 26 mai 2015, 21:13
par Bruno92
Bon allez, mon petit avis rapide sur la représentation d'hier soir (pas définitif et loin de l'exhaustivité des autres)

Découverte musicale pour moi aussi que ce "Roi Arthus" de Chausson !!
Pour la musique, on trouve les intonations de la musique française de ce début du siècle (J'ai retrouvé principalement du Debussy avec ses périodes parlé-chanté)
Mais on trouve aussi beaucoup de Wagner dans les passages musicaux entre les différents tableaux. Plusieurs fois, j'ai cru être dans le final du "Crépuscule des Dieux", de même que pour la construction de chaque acte de cet opéra (ouverture, tableau, interlude, tableau) pendant trois actes. Wagner aurait juste ajouté un interlude et un tableau par acte ...
C'était le problème de Chausson. Il voulait s'écarter de Wagner en le vénérant ... Équation difficile à réaliser...

Pour le reste, je ne parlerai que de la prestation magistrale de Philippe Jordan et de la jeune garde française du chant :

La direction de Philippe Jordan ma fascine à chaque fois qu'il aborde ce répertoire assez lent de la fin du XIXème/début du XXème siècle (Wagner, Debussy et maintenant Chausson). Il arrive à trouver des tempi magnifiques,
C'est sa vraie force par rapport aux autres chefs : la lenteur ... il laisse respirer l'orchestre, les artistes. Ce fut encore le cas hier soir (25 mai 2015).
Cette lenteur nous permet en plus d'entendre des instruments que rarement on distingue. Hier soir encore, les triangles sonnaient distinctement (ce qu'il avait déjà réussi à faire lors du festival Ring de l'ONP il y a quelques années).
Exceptionnelle ovation du coup pour lui-même et l'orchestre aux saluts (de loin, le plus applaudi)

Côté jeune garde, Stanislas de Barbeyrac était exceptionnel ... pour moi, c'était la grosse claque du cast. Projection de voix énorme dans ce vaisseau de Bastille, tout est intelligible et magnifiquement ciselé vocalement !! C'est surement avec Florian Sempey un de nos plus grands espoirs français côté lyrique !!! Dommage que son rôle de Lyonnel soit malheureusement trop court ....
Autre future star française du chant : Cyrille Dubois (autre sociétaire de l'atelier lyrique de l'ONP (comme Florian Sempey )) qui en deux passages sur la scène de la Bastille nous produit un chant extraordinaire de limpidité. Il mérite bien sa victoire de "révélation lyrique 2015" aux victoires de la musique classique

Bref, une excellente soirée vocale (tout le reste du cast était magistral malgré quelques réserves sur Thomas Hampson)
Après, j'exclue la mise en scène que j'ai trouvé soporifique ...