Weber - Der Freischütz - Tuohy/Gauchard - Limoges - 03/2015

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JdeB
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Weber - Der Freischütz - Tuohy/Gauchard - Limoges - 03/2015

Message par JdeB » 12 mars 2015, 10:10

Der Freïschütz

Direction musicale : Robert Tuohy
Chef de chant : Thomas Palmer
Mise en scène : David Gauchard
Collaborateur artistique : Nicolas Petisoff

Assistant metteur en scène : Michael Martin-Badier
Scénographie : Fabien Teigné
Costumes : Joël Viala
Vidéos : David Moreau
Lumières : Christophe Chaupin

Kaspar, Samiel, Ermite : Andreiy Maslakov
Max : Martin Homrich
Agathe : Ileana Montalbetti
Annchen : Anna Patalong
Kuno : Frédéric Caton
Ottokar : Andreas Scheibner
Kilian : Boris Grappe

Chœur de l’Opéra-Théâtre de Limoges
Direction : Jacques Maresch

Orchestre de Limoges et du Limousin

Limoges, le 10 mars 2015.



La carrière du Freischütz, créé à Berlin le 18 juin 1821, a été aussi triomphale que fulgurante. De décembre 1821 à novembre 1822, le nouvel opéra fait son entrée au répertoire de 25 villes germaniques et s’impose d’emblée, pour la critique et pour le public, comme le premier opéra romantique allemand. Dans sa langue originale, il est très rapidement monté à Budapest (mai 1822), Amsterdam (automne 1822), Riga (octobre 1822), Berne (mars 1823) et Saint-Pétersbourg (janvier 1824) tandis que le livret est très vite traduit en danois, suédois, tchèque, russe et en anglais (Le Freischütz est créé à Londres à l’automne 1824). En mars 1825, il franchit l’Atlantique ; on l’applaudit à New York et Philadelphie.

Dès 1823, Habeneck, le directeur de l’Académie royale de musique, essaye de rentrer en contact avec Weber pour l’inviter à venir diriger cette partition dans notre capitale et lui passer commande d’un nouvel opéra dans notre langue. Le projet n’aboutira jamais. La création dans notre pays a lieu, dans une adaptation française très libre, le 7 décembre 1824 à l’Odéon sous le titre de Robin des Bois ou les trois Balles. Six ans plus tard, en mai 1830, Paris découvre la version originale au Théâtre des Italiens, dans la salle de l’Opéra-Comique, avec dans le rôle d’Agathe W. Schröder-Devrient, la créatrice de Fidelio. Berlioz et E. Pacini en donnent une autre version française en juillet 1841 sous la baguette d’Habeneck. A l’été 1842, la troupe allemande de Mme Gued et Eichfeld présente le Freischütz (et Fidelio) en langue originale à Nîmes.

Si l’œuvre ne s’est pas totalement imposée au répertoire en France, signalons quelques productions mémorables: celle du 9 juin 1927 avec G. Lubin à Garnier, la 234 ième et dernière représentation à l’Opéra. Elle a été néanmoins présentée à Paris, après une longue éclipse, en juin 1980 à Pleyel en version de concert, en mars 1988 au Châtelet (Janowski / Freyer) et en décembre 1999 au Théâtre des Champs-Élysées (Chung / Negrin). La version de Berlioz a été redonnée salle Favart en avril 2011 sous la direction de JE Gardiner (et en avril 2013 à Nice).

En province, c’est logiquement Strasbourg qui l’a le mieux servie au fils des productions de la saison 1958/59 avec Windgassen en Max, de 1972 avec José Van Dam en Kaspar et de février 1999 (Guschlbauer / Engel). Il y a eu quelques autres productions notables en province, notamment à Lyon en 1980, à Marseille en 1986, à Nancy en mars 1999 dans une mise en scène d’Olivier Py, …



La nouvelle production de Limoges évacue deux éléments fondamentaux de cet ouvrage ; le pittoresque et l’omniprésence de la nature (réduite ici à la présence d’un squelette d’arbre déraciné qui a perdu toutes ses feuilles et d’un carré d’eau qui n’est peut-être même pas visible du parterre…). Tandis que les animaux sont minéralisés en chiens de porcelaine (de faïence ?) blanche qui vont être peints de petits cœurs noirs puis symboliquement « égorgés » par une traînée de peinture orange barbouillée…
La note d’intention du metteur en scène David Gauchard nous parle de « lutte des classe » tandis que le spectacle agrège les différentes groupes sociaux (paysans et guerriers) en une masse compacte et uniforme ! La scénographie se déploie devant un immense vitrail-grillage aux couleurs changeantes qui rappelle un peu celui de la production légendaire de Saint François d’Assise par P. Sellars, l’art cinétique de V. Vasarely (et son décor pour un Tannhäuser à Garnier) et, étonnamment, un mur latéral assez mal en point des Galeries Lafayette à quelques centaines de mètres de là…
Voilà les risques qu’on encourt à engager des metteurs en scène de théâtre débutants dans l’art lyrique.
Toutefois, ce spectacle est assez lisible, fluide, très cohérent et on ne s’y ennuie guère une fois passée une première partie des plus statiques. La scène de la Gorge aux loups ne manque pas d’impact, dans sa simplicité, avec un chœur enveloppé dans la nuit qui fulmine des sifflements inquiétants tout en s’adonnant à quelque lugubre bacchanale…et surtout un personnage mystérieux qui extirpe des potions lacustres, comme on brandit un trophée après la victoire, les sept « balles franches », stylisées ici en autant de lances.

La distribution, inédite, réunit de jeunes chanteurs aux physiques très idoines, bien investis dans leur rôle respectif et aux moyens vocaux non négligeables mais qui ne maîtrisent pas encore parfaitement la technique ni le style. La justesse n’est pas toujours au rendez-vous (à l’orchestre non plus). Par contre, les récitatifs sont éloquents et sensibles.

Anna Patalong (Annchen) charme par un timbre frais, lumineux et charnu. Ileana Montalbetti (Agathe) séduit moins car son registre grave sonne sourd, sa palette de couleurs est assez limitée et sa vocalisation sommaire mais son Agathe, bien projetée, existe néanmoins.
La basse Andriy Maslakov (Kaspar), une grande voix pleine et riche d’harmoniques, ne dispense pas le chant le plus raffiné du monde, loin s’en faut, mais son impact est indiscutable. Il traduit la schizophrénie de Kaspar avec force. L’Ottokar d’Andreas Scheibner est lui aussi d’un beau relief et très animé. Martin Homrich, Max wagnérien un peu monolithique et au vibrato pas toujours parfaitement discipliné, parvient à exprimer le poids pétrifiant de la pression sociale qui pèse sur ses épaules, l’enjeu colossal pour son avenir des épreuves de tir qui l’attendent et sa peur vaincue au moment de descendre dans l’antre de la terrifiante Gorge aux loups. La sincérité de son amour pour Agathe aussi.

Le grand triomphateur de la soirée, retransmise en direct sur Radio Classique (d’où la présence d’Etienne Mougeotte et d’Alain Duault), est le chef Robert Tuohy dont on a eu la chance de découvrir le talent très tôt à Montpellier. On admire la vigueur dramatique qu’il insuffle à l’ensemble, sa probité stylistique, son sens des nuances et son travail sur les couleurs à la tête d’une phalange modeste mais qu’il a déjà fait progresser.

On se réjouit aussi de croiser toujours autant de jeunes dans cette salle alors que le public lyrique de nos provinces (surtout dans la moitié sud) a tant de mal à se renouveler.

Et on rêve d’entendre à nouveau Euryanthe et de découvrir en scène Obéron….

Jérôme Pesqué
Parution de ma biographie "Régine Crespin, La vie et le chant d'une femme" ! Extraits sur https://reginecrespinbiographie.blogspot.com/
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Re: Weber: Der Freischütz-Tuohy/ Gauchard-Limoges-03/2015.

Message par Catherine » 12 mars 2015, 18:48

Je te trouve bien indulgent avec la mise en scène...

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Re: Weber: Der Freischütz-Tuohy/ Gauchard-Limoges-03/2015.

Message par JdeB » 13 mars 2015, 10:31

J'ai pourtant émis pas mal de réserves sur cette mise en scène justement.
Parution de ma biographie "Régine Crespin, La vie et le chant d'une femme" ! Extraits sur https://reginecrespinbiographie.blogspot.com/
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Re: Weber - Der Freischütz - Tuohy/Gauchard - Limoges - 03/2

Message par HELENE ADAM » 13 mars 2015, 22:12

Un Freischutz est prévu en VC au TCE également la saison prochaine.
Lui : Que sous mes pieds se déchire la terre ! que sur mon front éclate le tonnerre, je t'aime, Élisabeth ! Le monde est oublié !
Elle : Eh bien ! donc, frappez votre père ! venez, de son meurtre souillé, traîner à l'autel votre mère

Mon blog :
https://passionoperaheleneadam.blogspot.fr

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