Wagner- Le Vaisseau fantôme – Beermann/Fau – Toulouse – 05/2025

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micaela
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Re: Wagner- Le Vaisseau fantôme – Beermann/Fau – Toulouse – 05/2025

Message par micaela » 16 mai 2025, 16:34

Photos prometteuses. Si c'est le Hollandais sur la photo 2, on comprend que Senta fantasme (ou peu s'en faut) sur son portrait...
Le sommeil de la raison engendre des monstres (Goya)

Locorotondo
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Re: Wagner- Le Vaisseau fantôme – Beermann/Fau – Toulouse – 05/2025

Message par Locorotondo » 17 mai 2025, 01:44

Encore une soirée enthousiasmante au Capitole,on ne sait qu admirer le plus.....une Senta grandiose,,un hollandais d une puissance ( et inquiétant)phénoménale,un Erik dont Hernandez a fait son rôle etc .Des seconds rôles parfaits...un orchestre puissant,qui disseque la partition comme jamais....des choeurs sublimes...et une mise en scène qui a laissé le théâtre sans voix jusqu aux acclamations délirantes pour Mr Fau ....

jeantoulouse
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Re: Wagner- Le Vaisseau fantôme – Beermann/Fau – Toulouse – 05/2025

Message par jeantoulouse » 18 mai 2025, 18:20

Superbe représentation en cette matinée dominicale. Énorme succès. Troupe, orchestre et chef ovationnés. Michel Fau, bien que ce ne soit pas la Première, est venu prendre part aux saluts : la salle l'a acclamé. Un Vaisseau "romantique" au sens plein (et germanique) du terme. Daumier illustrant la Ballade du vieux Marin de Coleridge, avec la toute puissance du théâtre lyrique.
Compte rendu demain.

jeantoulouse
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Re: Wagner- Le Vaisseau fantôme – Beermann/Fau – Toulouse – 05/2025

Message par jeantoulouse » 19 mai 2025, 11:20

Après Ariane à Naxos, Elektra et Woyzzeck, Michal Fau signe au Capitole sa quatrième mise en scène de grand opéra. Bien qu’elles soient toutes singulières et fidèles à l’esprit et à la lettre de chaque œuvre, elles apparaissent toutes comme des fantasmagories. Michel Fau est un conteur et il ouvre pour nous à chaque fois un somptueux livre de contes illustré et en relief. Les tragédies dont il montre la puissance poétique et ludique semblent sortir d’un rêve, noir et/ou doré, cauchemar d’enfant ou illumination colorée. Avec Le Vaisseau fantôme – et la traduction française du titre allemand s’avère ici plus éloquente que le Hollandais volant (Der fliegende Holländer) – est très précisément le récit d’une fantasmagorie née de la contemplation amoureuse d’une image. Du tableau – une marine – qui fascine Senta, sortira le personnage fantastique du Hollandais, tel le héros du film de Woody Allen traversant l’écran dans la Rose pourpre du Caire. Le coup de force théâtral que réussissent Michal Fau et les splendides décors et toiles peintes brossés par Antoine Fontaine, les lumières oniriques de Joël Fabing et les costumes contrastés et colorés de Christian Lacroix est d’oser porter sous nos yeux un conte fantastique, un univers mystérieux et inquiétant, en jouant franc jeu. Attaché scrupuleusement aux didascalies écrites par Wagner, sans s’interdire d’ouvrir les portes à l’imagination, Fau et son équipe artistique transportent le spectateur sur les côtes rocheuses d’un village norvégien du XVII° siècle. La mer est là présente restituée avec des éléments de décors et des toiles qui assument leurs artifices. Le bateau du Hollandais, celui de Daland sont accostés : c’est du théâtre, mais ce mensonge théâtral, nous y adhérons comme l’enfant croit à ses livres d’images. Fau – le nom lui-même devient un symbole, une revendication, un manifeste - fantôme, fantasme, fantaisie, fantasmagorie : la chaine sémantique dit le triomphe de la théâtralité, du rêve, de l’émotion d’être emportés, « ravis » par la beauté étrange de cet opéra mer. Les photographies reflètent cet univers théâtral qui assume ses codes et ses leurres, empruntant aux illustrations de la création de l’opéra de Wagner à Dresde, mais s’en affranchissant ou en les sublimant grâce aux artifices techniques de la modernité. L’imagerie puise amplement dans les illustrations splendides de Gustave Doré pour la Ballade du vieux Marin de Coleridge et pour la scène finale ose les effets un peu kitsch des mises en scène du XIX° siècle (Londres, 1870). Prenant de front les difficultés que pose ce livret – deux actes imposent des scènes en mer – en se les coltinant (pour reprendre son mot), Michel Fau choisit d’émerveiller et de surprendre (l’alignement de rouets pour le chœur des fileuses, le surgissement du Hollandais, le final tempétueux) et emporte le spectateur dans son rêve. Même la direction d’acteurs assume un choix d’artifice théâtral : statique, elle ose souvent l’affrontement avec la salle, la présence des chanteurs debout, éclairés et droits face au public, pour laisser sa place au chant, à la musique, à leur pleine exposition/expansion. Le triomphe aux saluts témoigne de l’éclatant succès de cette audacieuse entreprise qui joue avec les conventions pour affirmer un geste artistique : que vive le théâtre !

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Crédit Mirco Magliocca

La réussite musicale tient d’abord à la splendeur d’un Orchestre du Capitole des grands jours et d’une direction intense. Frank Beermann qui a déjà servi ici avec puissance Wagner et Strauss dose les effets avec un art très sûr des contrastes et des climats. Dès l’ouverture, il étage ou échelonne les niveaux sonores, conférant un relief saisissant à la partition entre fantastique, épopée et scènes de genre. La même science des plans sonores est à l’œuvre dans l’accompagnement du récit, tantôt pimpant, tantôt inquiétant, clair ou sombre, tendu ou impétueux. L’acte III constitue l’acmé de cette interprétation, portant dans le même souffle les chœurs des filles, celui des matelots, l’ensemble des « fantômes », et le trio final, de toute beauté. Les Chœurs du Capitole dirigés par Gabriel Bourgoin ne souffrent d’aucune baisse de régime. Ardents, puissants, engagés, décidés, éclatants, ils « se donnent » : l’amplitude sonore ne ternit jamais l’harmonie et la musicalité. Le Pilote de Valentin Thill est à l’image de ce beau ténor, vaillant, tonique, enthousiaste. Jean Teigen, basse solide que l’on connait bien, sait dessiner un personnage et donner à Daland sa juste part de vénalité, de rouerie et d’affection paternelle. Airam Hernandez, une des valeurs sûres des distributions capitolines, brille en Eric, fiancé ardent et douloureux : la voix allie charme, puissance et couleurs aussi bien dans les récits que dans les ensembles (duo, trio). Familière du rôle, Ingela Brimberg saisit par la brillance d’une voix chatoyante, vive, tranchante et nuancée selon les climats. La Ballade varie les intensités, les intentions, les rythmes d’un récit qui devient incantation. Sa Senta, happée par l’image du Hollandais, est à la fois un personnage incarné et comme en allé. Le Hollandais d’Aleksei Isaev est superbe de style, d’engagement lyrique. Moins fantôme que mâle présence, il campe un séducteur tourmenté mais décidé, prêt à tout pour mettre fin à la malédiction. Timbre, posture, présence, voilà un bien beau héros en chair et en voix, romantique à souhait, trainant tous les cœurs après lui, et le public exulte.

Image

Crédit Mirco Magliocca

Une réussite théâtrale et musicale à mettre au crédit une nouvelle fois de l’équipe artistique, musicale et technique du Capitole. De production en production, s’est créée autour de Christophe Ghristi une famille ( chefs, metteurs en scène, chanteurs et bien évidemment les ensembles « maison) que l’on retrouve dans des configurations différentes pour des productions singulières, mais aux qualités reconnues. Elle assure au Capitole une identité artistique propre, homogène et diversifiée que le public plébiscite si on en croit les taux de remplissage, d’abonnements et de réservation pour la prochaine saison.

Jean Jordy



PS. La veille de la Première, le 15 mai, un autre Vaisseau fantôme accostait, en version concert à Bruxelles, sous la baguette de Tarmo Peltokoski, qui a confirmé, si on se fie à deux comptes rendus, ses immenses talents pour diriger des opéras. Rappelons que, Directeur Musical de l’Orchestre national du Capitole de Toulouse, il fera ses débuts dans la fosse pour Don Giovanni en novembre.

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kirby
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Re: Wagner- Le Vaisseau fantôme – Beermann/Fau – Toulouse – 05/2025

Message par kirby » 26 mai 2025, 08:55

Très belle représentation hier. Ce qui, ailleurs pourrait tomber dans le kitsch est transcendé ici par l’alliance entre les images, la musique et les voix.
De l’opéra de haut niveau qui coupe le souffle.
J’aime rarement été aussi ému par le final de cet opéra.

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Re: Wagner- Le Vaisseau fantôme – Beermann/Fau – Toulouse – 05/2025

Message par truffaldino » 29 mai 2025, 19:01

Et moi par la trouvaille du passage du premier au deuxième acte... Je ne sais pas si l'idée est inédite mais ça marche tellement bien.
Chapeau à Jean Teitgen, un peu oublié dans les louanges. Voix et jeu d acteur très subtils.

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Re: Wagner- Le Vaisseau fantôme – Beermann/Fau – Toulouse – 05/2025

Message par mariuszbartok » 29 mai 2025, 22:30

Oui, superbes décors, très belle mise en scène. Le surgissement du vaisseau fantôme, derrière le navire de Daland, est impressionnant ! Remarquable spectacle.

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