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par raph13 » 23 mai 2025, 11:46
Représentation du 22 mai
Pas un mot avant de saluer bien bas la prestation d'Asmik Grigorian !
Après une Lauretta timide et qui ne fait pas du célèbre "Babbino caro" un air de concert mais une supplique touchante, et une Giorgietta lascive et à la soif de changement vorace, c'est évidemment en Suor Angelica que la chanteuse marque le plus.
Sa prestation époustouflante m'a laissé KO et en larmes : du 4ème rang je n'ai pas perdu une miette de son jeu épatant, avec un visage très expressif et un engagement qui vous prend aux tripes.
La soprano est pour moi aujourd'hui la seule à allier ce niveau de maîtrise vocale et de talent d'actrice, avec un magnétisme rare.
Une prestation magistrale saluée par une ovation tonitruante d'un public debout.
Quel dommage par ailleurs de gâcher ce final en la faisant se crever les yeux… Passe encore pour la robe noire et la clope (Grigorian fait cela à merveille) mais cette incongruité tombe comme un cheveu sur la soupe et vient casser l'émotion lors de ce climax !
C'est d'autant plus rageant que la production de Christof Loy est par ailleurs tout à fait réussie : drôle sans lourdeur dans Gianni Schicchi, tendue et oppressante Il Tabarro, et épurée mais efficace pour Suor Angelica.
Le tout assorti d'une excellente direction d'acteurs.
Misha Kiria crève la scène en Schicchi, physique de personnage de BD et voix de stentor, dans une composition truculente du paysan rusé.
Bons seconds rôles mais pas tous très audibles ; on se demande néanmoins où l'OnP est allé pêcher Alexey Neklyudov, à la voix étriquée et qui s'étrangle dans l'aigu.
Roman Burdenko est un Michele imposant, dont la brutalité et les éclats vocaux donnent le frisson, tandis que Joshua Guerrero campe un Luigi ardent et viril.
Si Karita Mattila en impose de par sa stature et son port, elle surjoue un peu trop pour masquer le fait qu'elle n'est en rien le contralto attendu pour la Zia Principessa. Mais j'avoue que je suis toujours sensible aux bribes de son timbre si prenant…
La voix d'Enkelejda Shkoza est désormais bien fatiguée mais sa faconde fait mouche en Zita et Frugola, et elle est une abbesse attendrissante. Les nonnes sont excellentes et on retient particulièrement l'émouvante Suor Genovieffa de Margarita Polonskaya.
Carlo Rizzi mène avec brio la soirée, à la tête d'un orchestre en grande forme et aux sonorités suaves.
Pour moi le spectacle le plus réussi de la saison à l'OnP !
« L’opéra est comme l’amour : on s’y ennuie mais on y retourne » (Flaubert)