Il faut réhabiliter "L'Opéra d'Aran"!!!

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pingpangpong
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Re: Il faut réhabiliter

Message par pingpangpong » 13 janv. 2016, 19:26

Le sujet a été ouvert ici et dge proposait très aimablement de fournir le livret à qui le souhaite
:
http://www.odb-opera.com/viewtopic.php? ... %C3%A9caud

Mais la mise à dispo dans la base de livrets d'ODB est une très bonne idée car on peine vraiment à comprendre le texte dans l'enregistrement Frémeaux.
La version avec G.Bécaud et Sarroca serait de 1992 si j'en crois les indications de publication dans la jaquette (ou 1991 quand on sait qu'il y a souvent un délai entre la date d'enregistrement et sa mise en vente). "Orchestre et choeurs sous la direction de Raymond Bernard-Cohen" est la seule info quant à l'orchestre.
Cet enregistrement, avec sa prise de son survitaminée, des voix trop proches et des bruitages assez artificiels (bruits de porte qui se ferme, bagarre à coups de poing sonores...) est plus proche de ce qu'on entend en musique de variété et donne plus souvent l'impression d'une bande son de comédie musicale que d'un opéra, effet que ne rend pas l'enregistrement de 1962, très longtemps attendu et demandé par les fans de Bécaud aaussi bien que par les lyricomanes.
Enfin elle avait fini ; nous poussâmes un gros soupir d'applaudissements !
Jules Renard

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Re: Il faut réhabiliter

Message par sopranolove » 14 janv. 2016, 13:53

Mais moi, j'ai très bien entendu les paroles quand Mickey, Sean et Mac Creagh chantent ! Ce sont Maureen et Angelo qui sont plus criticables sur ce plan là....

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dge
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Re: Il faut réhabiliter

Message par dge » 14 janv. 2016, 18:34

J'avais en préparation un petit topo militant pour une résurrection de Opéra d'Aran quand j'ai découvert ce fil. Je vous livre ma prose, même si c'est peut-être parfois redondant avec ce qui a été publié ci-dessus.

Opéra d'Aran ( et non L'Opéra d'Aran) a été copmosé par G.Bécaud sur un livret de Jacques Emmanuel, Louis Amade et Pierre Delanoé qui était un des paroliers préférés du chanteur.
Qu'un chanteur / compositeur de variétés se lance dans l'aventure d'écrire une œuvre lyrique peut étonner. En fait G.Bécaud a fait des études musicales au Conservatoire de Nice et avant Opéra d'Aran il avait composé une Cantate de Noël L'enfant à l'étoile crée en l'église de Saint Germain l'Auxerrois le 24 décembre 1960 sous la direction de Georges Prêtre avec les Chœurs Elizabeth Brasseur, et retransmise en direct à la Télévision Française.

Opéra d'Aran a été crée au Théâtre des Champs Elysées le 25 octobre 1962 avec l'Orchestre de la Société des Concerts du Conservatoire sous la direction de Georges Prêtre et dans une mise en scène de Margarita Wallman. Cette création a été un évènement mondain extraordinaire, auquel assistait le "Tout Paris". Si l'œuvre a connu un certain succès public ( une centaine de représentations) la critique parisienne la juge plutôt sévèrement, Clarendon étant un des rares à souligner ses qualités. Il est vrai qu'en 1962 l'œuvre ne correspondait pas aux canons musicaux de l'époque ( cette même année voyait la création de Pli selon Pli ).
L'œuvre était jugée réactionnaire, utilisant une déclamation trop lyrique sans avancée musicologique.

La distribution était internationale et hétérogène puisqu'on y retrouvait une soprano italienne (Rosanna Carteri) un ténor italien (Alvino Misciano) un baryton brésilien ( Peter Gottlieb ), une basse néerlandaise ( Frank Schooten) une mezzo belge ( Agnès Disney)et une basse française Roger Soyer. Voix inégales, s'exprimant dans un Français peu intelligible ( la suite a montré qu'on pouvait faire beaucoup mieux en utilisant des chanteurs français ou francophones), c'était un réel handicap compte tenu de la qualité du livret.

C'est à Lyon que l'œuvre a ensuite été donnée, avec une distribution de bien meilleure qualité, le 20 novembre 1964 sous la direction d'Alain Lombard et dans une mise en scène de Louis Erlo. Christiane Stutzmann était Maureen, Alain Vanzo Angelo, Michel Dens Mickey, Geneviève Macaux Mara, Jean Angot Sean et Huc Santana Mc Creagh. J'étais à cette représentation, enthousiasmé par ce que j'avais découvert. Le succès public a été immense, de longues minutes d'ovations au rideau final pour attendre l'arrivée du compositeur qui finalement ne viendra pas...pour raison de brouillard sur l'aéroport de Bron. L'œuvre sera redonnée la saison suivante avec une distribution voisine, Albert Voli étant Angelo.

Il existe un enregistrement avec la distribution de la création ( on peut le trouver sur le Net) longtemps introuvable et qui vient d'être réédité. Un autre enregistrement existe - pirate ? - datant apparemment de 1963- qui bénéficie de l'interprétation superbe de Suzanne Sarroca, avec André Turp dans le rôle d'Angelo , Roger Soyer dans celui de Sean et G. Bécaud qui fait une composition extraordinaire de sensibilité et de justesse du rôle de Mickey. Malheureusement Virginia Vee n'a pas grand'chose à faire en en Mara et elle déséquilibre le bon niveau de cette distribution. L'orchestre - dont le nom n'est pas mentionné - sous la direction de Raymond Bernard Cohen est mal enregistré et sonne comme un orchestre de music-hall. Cet enregistrement a deux mérites : il est bien chanté et les paroles sont parfaitement intelligibles.

Opéra d'Aran a ensuite été crée à Montréal sous l'impulsion se son maire Jean Drapeau en 1966 avec Suzanne Sarroca et André Turp. Quelques productions ont eu lieu en France ( Toulon, Tours...c'est assez mal diocumenté) mais l'œuvre peine à trouver sa place au répertoire.

Alors quelle place pour Opéra d'Aran aujourd'hui ? Opéra, opérette, comédie musicale ? Ni l'un ni l'autre sans doute mais un peu de tous à la fois.

Le livret est excellent, concis, clair. Le drame est serré au plus près, il n'y a pas de temps mort.
L'œuvre déborde de lyrisme. A l'époque de la création on avait demandé à Bécaud quels étaient les compositeurs lyriques qui l'avaient le plus marqué. Puccini, Puccini, Puccini avait-il répondu. Toutes proportions gardées l'écriture a des affinités pucciniennes, mais tire aussi beaucoup du côté de Menotti. A côté de passages très opératiques , le très bel air de Maureen à la fin du premier acte "Sean est mort...Qui me retient encore ici..." (dont on s'étonne qu'il ne figure pas dans quelques récitals - écoutez Sarroca ! ) l'air final d'Angelo "Non ne pleure plus! Rien ne peut plus nous séparer..." -(Vanzo y est sublime) sont d'une très belle inspiration. Certains passages sont plus apparentés à des musicals et ce patchwork peut surprendre. L'orchestration est simple bien sûr, mais rend parfaitement les différentes ambiances. Toute la scène finale dégage une émotion que l'on rencontre rarement.

Alors pourquoi cette désaffection? Y a t-il un problème avec les ayant-droits? Notre manie de tout mettre dans des cases fait elle qu'une œuvre d'un chanteur de variétés ne puisse pas être cochée dans la case œuvre lyrique? Considère t-on qu'elle est trop légère pour être un opéra, trop sérieuse pour être une opérette ou une comédie musicale? ...On rejoue bien les comédies de Michel Legrand - et c'est justice- alors pourquoi pas Opéra d'Aran ? Il y a beaucoup de jeunes chanteurs français talentueux qui rendraient justice à cette œuvre et nous feraient un peu moins regretter que personne n'ai eu l'idée pourtant évidente de l'enregistrer avec Alain Vanzo, Suzanne Sarroca, Michel Dens ou Gilbert Bécaud.

Bref, vous aurez compris que j'adore cette œuvre qu'il faudrait réussir à tirer de l'oubli dans lequel elle est...

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Re: Il faut réhabiliter

Message par emji » 15 janv. 2016, 08:50

Bonjour, je suis à l'origine de ce fil sur Opéra d'Aran ! ;) Je suis donc bien heureux de voir autant de commentaires sur cette oeuvre qui est dans son genre effectivement un vrai petit chef d'oeuvre au livret aussi poétique qu'émouvant !...

Je puis vous répondre déjà en partie sur les ayants droits : ayant créé un orchestre d'étudiants et déjà monté plusieurs opéras, j'avais eu l'ambition pour 2015 (pour les 10 ans de mon orchestre), de monter Aran.
Sur les conseils des éditions Salabert qui ont le matériel d'orchestre, j'ai donc contacté la famille et les ayants droits pour Aran. Salabert m'avait laissé entendre que ce n'était pas simple d'obtenir les- dits droits, mais après qq semaines d'attente je reçu une acceptation et même une réponse non seulement positive mais même chaleureuse et enthousiaste pour mon projet ( malheureusement celui-ci ne vit pas le jour pour d'autres raisons )...

Donc, non il faut se rendre à l'évidence : ce sont les direction de maisons d'opéras qui ont considérablement restreint ou réorienté leurs programmation vers soit des oeuvres plus ... "contemporaines " ou à l'inversement proportionnel vers des partitions baroques plus ou moins intéressantes d'ailleurs...

Et je pense, surtout une méconnaissance totale de cette oeuvre. Je les imagine très bien faire la fine bouche devant cette oeuvre composée "par un musicien de variété" (qui fit tout de même ses classes au conservatoire de.. Paris !!)... Alors oui, triste obstruction des grandes scènes qui auparavant le programmaient régulièrement... Peut être que la réédition discographique récente aidera à sa réhabilitation... Et surtout une véritable curiosité de la part des directeurs de maisons d'opéra aiderait fortement à cela... Ou enfin qu'un grand chanteur - ou chef d'orchestre - s'y intéresse et l'impose à un opéra... Espérons ...

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Re: Il faut réhabiliter

Message par pingpangpong » 15 janv. 2016, 12:47

Dans Je chante N°7 un spécial Bécaud très intéressant et en particulier un article sur cet opéra en page 30 : http://fr.calameo.com/read/000635792eff29a5ed340

D'après un célèbre site qui se veut "Encyclopédie libre" l'enregistrement avec G.Bécaud en Mickey, publié seulement en 1992, serait de 1966.
Enfin elle avait fini ; nous poussâmes un gros soupir d'applaudissements !
Jules Renard

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Re: Il faut réhabiliter

Message par Piero1809 » 21 janv. 2016, 22:25

Je n'avais pas vu ce fil.
Opéra d'Aran avait été un événement dans les années 60. Aujourd'hui il est possible de l'écouter et c'est déjà une chose magnifique qui empêche cette oeuvre de sombrer dans un oubli total.
La musique de cet opéra est très agréable et sans aucune vulgarité. C'est évidemment de la musique tonale, facile, sans aucune aspérité qui vise à plaire, à émouvoir éventuellement. Une atmosphère attachante se dégage de cette musique qui reflète son époque et pour moi de lointains souvenirs.
J'ai quand même un problème avec cette musique car de l'eau a coulé sous les ponts depuis Verdi ou Puccini et il y avait en 1960 d'autres moyens et d'autres langages musicaux pour exprimer les sentiments présents dans le livret.
Contrairement à ce qui a été dit par les commentaires précédents, je ne vois aucune analogie avec Puccini. J'y entends plutôt un héritage de l'opéra français avec de temps en temps des tournures mélodiques d'Outre Atlantique.
La version de 1962 dirigée par Georges Prêtre me plait beaucoup.

Evidemment une reprise de cet opéra serait souhaitable, peut-être à l'occasion du centenaire de la naissance de Gilbert Bécaud?

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Re: Il faut réhabiliter

Message par Schwannhilde » 23 janv. 2016, 10:08

PlacidoCarrerotti a écrit :
sopranolove a écrit :Henri Médus, une des grandes basses profondes de l'Opéra dans ces années là
J'ai lu qu'on disait de lui que c'était la voix la plus grave du monde.
On peut l'entendre en vieillard hébreux dans Samson et Dalila avec José Luccioni : c'est très impressionnant.
Et dans la cavatine du cardinal de La juive, c'est grave, très grave...
" Vaut mieux en rire que s'en foutre " (Didier Super)

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Re: Il faut réhabiliter

Message par JdeB » 24 janv. 2016, 13:57

emji a écrit :. Alors oui, triste obstruction des grandes scènes qui auparavant le programmaient régulièrement...
je ne suis pas sûr pas du tout que cet Opéra d'Aran ait jamais figuré régulièrement au répertoire des grandes scènes ni des moyennes.
Parution de ma biographie "Régine Crespin, La vie et le chant d'une femme" ! Extraits sur https://reginecrespinbiographie.blogspot.com/
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Re: Il faut réhabiliter

Message par JdeB » 24 janv. 2016, 14:04

[quote="dge"
Opéra d'Aran a ensuite été crée à Montréal sous l'impulsion se son maire Jean Drapeau en 1966 avec Suzanne Sarroca et André Turp. Quelques productions ont eu lieu en France ( Toulon, Tours...c'est assez mal diocumenté) mais l'œuvre peine à trouver sa place au répertoire.
..[/quote]

oui, c'est en effet le cas...

A Nîmes, j'ai relevé deux seules soirées:

20 janvier 1974, L’Opéra d’Aran,
Jean Lapierre / F. L’Huillier,
Aldo Filistad, M. Trempont, C. Stuzmann

13 janvier 1980, L’Opéra d’Aran,
Michel Fournier / F. L’Huillier,
Aldo Filistad, Michèle Herbé, Alain Fondary, Jacques Mars


La dernière reprise me semble être celle du festival de Lamalou avec Fondary

15 juillet et 17 aout 2005, Lamalou les Bains L'Opéra d'Aran (Bécaud) P. Berger / F. Lhuillier J. Goyetch, A. Fondary, R. Farman, J-M. Ivaldi, N. Espallier
Parution de ma biographie "Régine Crespin, La vie et le chant d'une femme" ! Extraits sur https://reginecrespinbiographie.blogspot.com/
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Re: Il faut réhabiliter

Message par parsifal832 » 24 janv. 2016, 14:51

PlacidoCarrerotti a écrit :

sopranolove a écrit :
Henri Médus, une des grandes basses profondes de l'Opéra dans ces années là



J'ai lu qu'on disait de lui que c'était la voix la plus grave du monde.
On peut l'entendre en vieillard hébreux dans Samson et Dalila avec José Luccioni : c'est très impressionnant
J'ai eu la chance de le voir sur scène en 1964 à Toulon dans le SIGURD de E. REYER; il y chantait le role de HAGEN.
Bien que n'ayant pas encore la perception affinée par plus de 50 ans de fréquentation assidue des scènes lyriques, je me souviens encore qu'il m'avait fortement impressionné!

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