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par robertram » 03 avr. 2019, 19:39
Excellente représentation hier soir. Le public s'est chauffé au fur et à mesure des 5 actes, après un début un peu froid, pour finir debout aux rappels.
La partition retenue ne suit pas la totalité de l'édition critique (publiée par Ricordi) que Minkowski avait suivie (avec des microcoupures) en 2000 et 2001 à Berlin, mais une version proche de celles de Fulton (Paris) , Palumbo (Martine Franca) et Oren (Salerno et Londres) .
Toutefois, et c'est là un de ses mérites, au début du II Dimitri Korchak nous a gratifié en sus de l'air dit "de Mario" (composé pour lui pour les représentations londoniennes) qui figure dans l'édition critique et que Merritt avait exhumé de la bibliothèque de l'ONP. Korchak s'y est montré remarquable (accent, style, notes et contre-notes) comme pour le reste de la soirée dans ce rôle écrasant, d'autant que l'orchestre dans une version de concert sonne encore plus puissant (et que l'air en question se termine par une cabalette guerrière avec force percussions).
Lisette Oropesa a eu le plus gros succès public de la soirée, c'est un peu injuste pour Korchak. Elle a chanté comme sa Marguerite de Valois, avec quelques suraigus moins pleins et plus "pincés" ( je ne dis pas ça pour faire plaisir à Jérôme), une performance de haut vol quand même.
Yolanda Auyanet m'a moins convaincu, avec le moins bon français de la distribution, et un chant moins nuancé que les 4 autres rôles principaux.
Julien Dran a été aussi à un très haut niveau, ajoutant à la fin du duo bouffe du III avec Bertram un ut non écrit sauf erreur. L'absence de scène ne lui a pas permis de jouer sur le côté bouffe du personnage, mais il a convaincu haut la main sur ses seules qualités vocales.
Nicolas Courjal a été impressionnant d'autorité vocale et théâtrale tout au long de la représentation, notamment bien sûr pour la valse infernale et l'invocation des nonnes, impressionnant de puissance vocale mais aussi de raffinement mezza voce quand nécessaire. Je regrette d'autant plus qu'il n'ait pas osé la version ardue de son grand air du V (édition Ricordi encore).
Seconds rôles parfaits avec mention pour Pierre Derhet , impressionnant Héraut et maître de cérémonies.
Le chef a dirigé comme d'habitude, plutôt vite, avec une gestique et une activité physique intense sur le podium, enlaçant en plus théâtralement ses solistes méritant à la fin de chaque air, de chaque duo et de chaque acte. Parfois les voix étaient couvertes (fin de la ballade de Raimbaut au I, fins d'actes...) mais l'orchestre fourni étant à découvert et l'orchestration étant riche, le bon équilibre doit être difficile à trouver. A son crédit aussi, une mise en place sans décalage et la mise en valeur des solistes comme le premier pupitre de violoncelle qui s'est couvert de gloire.
Pas de mise en scène donc pas de polémiques à son sujet...et l'absence de chorégraphie oblige le spectateur à un effort pour fantasmer la lubricité d'une horde nonnes lascives.
Pour les absents séance de rattrapage vendredi 5 avril ou en diffusion le 4 mai.
Un chef d'œuvre du XIXème siècle et une pierre angulaire de l'histoire de la musique aussi bien servis j'en redemande, mais cette fois dans une production scénique (M. de Caluwe si vous venez à Paris, ou qui que ce soit qui succède à Lissner).