Lang - Der verschwundene Hochzeiter- Ictus/Esterházi- Bayreuth 07-2018

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Luc ROGER
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Lang - Der verschwundene Hochzeiter- Ictus/Esterházi- Bayreuth 07-2018

Message par Luc ROGER » 07 juil. 2018, 19:08

Le marié disparu de Klaus Lang, création mondiale d'un nouvel opéra au Festival de Bayreuth

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Pour la première fois depuis la création de Parsifal en 1882 à Bayreuth, un nouvel opéra sera créé dans le cadre du Festival de Bayreuth. Ce nouvel opéra, Der verschundene Hochzeiter, a été commandé par le Festival au compositeur autrichien Klaus Lang (musique et texte) qui a travaillé en collaboration avec le concepteur et metteur en scène Paul Esterházy. Cette production sera présentée dans le cadre du programme "Diskurs Bayreuth".

Bien sûr la colline verte reste sacrée et ce nouvel opéra ne sera pas créé dans la Maison du Festival dans laquelle seuls les opéras de Wagner peuvent être représentés. L'opéra sera joué dans une salle de cinéma historique du centre ville de Bayreuth, le "Reichshof", une salle art déco qui fut construite en 1925.

L'argument du Marié disparu ( Der verschwundene Hochzeiter) est inspiré d'une vieille légende de la vallée du Gölsental en Basse-Autriche: l'histoire insolite d'un jeune marié qui arrive un jour au mariage d'un noble étranger dans un pays inconnu et qui se voit inviter à trois jours de fêtes. A son retour, il se rend compte que trois cents années se sont écoulées.

Klaus Lang et Paul Esterházy se sont assuré la collaboration du groupe belge de musique contemporaine Ictus, basé à Bruxelles, préparé par George-Elie Octors. Voici comment Ictus présente le nouvel opéra sur son site web:

"La musique sonde l'espace vide, enveloppant le public. 'De la vacuité du vide à la plénitude du vide', selon les propres mots du compositeur. Et aussi 'la musique n'est pas destinée à séduire les cœurs, il veut les pénétrer, lancer des ramifications et créer des extensions.' Le voyage du jeune homme devient ainsi notre propre voyage, comme nous allons de l'avant, avec tous les sens en alerte, dans un monde étrangement familier, au coeur du silence jusqu'au coeur du son.

Deux acteurs-danseurs Jiří Bubeníček et Otto Bubeníček doublent les deux mariés (Hochzeiter I, Hochzeiter II) et deux chanteurs Alexander Kiechle (Der Hochzeiter) et Terry Wey (Der Fremde) interprètent le jeune marié et l'étranger.

Le concept est radicalement différent de celui de l'opéra wagnérien dont la liturgie suppose une représentation frontale d'un art total qui s'écoute dans un silence et une immobilité religieuses. Le groupe Ictus déconstruit ces paramètres en disséminant 12 voix dans une salle plongée dans la pénombre comme au début d'une séance de cinéma. Les 20 instrumentistes d'Ictus interpréteront la musique radicalement contemporaine de Klaus Lang, un compositeur qui n'en est pas à son premier opéra et qui travaille sur de nouvelles formes de théâtre musical, en s'appropriant notamment l'univers sonore contemporain.

Agenda: les 24, 26 et 27 juillet en la salle Reichshof de Bayreuth
Réservations: voir la page du site du Festival de Bayreuth consacrée à cette production.

Luc ROGER
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Re: Lang - Der verschwundene Hochzeiter- Ictus/Esterházi- Bayreuth 07-2018

Message par Luc ROGER » 28 juil. 2018, 19:53

Le marié disparu, un opéra en création mondiale de Klaus Lang, une commande du Festival de Bayreuth

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Crédit photos: Bayreuther festspiele / Diskurs Bayreuth / Enrico Nawrath

Avant que l'opéra ne commence, le conte autrichien du Marié disparu (Der verschundene Hochzeiter) est lu à l'assistance, ce qui est bien nécessaire car sans cette lecture l'opéra ne serait pas compréhensible, d'autant que comme il s'agit d'une création mondiale, il n'existe aucun référent culturel, et le public est composé de voyageurs vers l'inconnu.

Ce conte d'origine autrichienne raconte l'histoire d'un jeune homme de la vallée de Gölsen qui, comme c'était la coutume en ces temps reculés, invite tout le village et toutes les personnes qu'il rencontre à son mariage. Son chemin croise celui d'un étranger qu'il invite bien sûr à son mariage. L'étranger accepte et se présente à la noce. Avant de partir, il invite à son tour le jeune marié à son propre mariage qui par un curieux hasard aura lieu trois jours plus tard. Le marié accepte et se met bientôt en route vers le lieu indiqué par son nouvel ami qui lui a expliqué qu'il aurait à traverser une prairie, puis une lande avant d'arriver à une petite maison. Là il entendra la musique de la noce et il lui suffira de continuer sa route pour arriver à la maison de son hôte.

Il trouve la prairie, une pâture bien grasse sur laquelle paissent bizarrement des vaches très maigres, puis il traverse une lande plutôt aride sur laquelle il voit à son grand étonnement des vaches très grasses. La petite maison l'étonne car en émane un bourdonnement. Intrigué, il ouvre un loquet, et aussitôt des tas d'abeilles s'échappent de la maisonnette. Il en est très ennuyé pensant qu'il a occasionné une perte à son nouvel ami.

L'étranger l'accueille à la noce et l'invite à danser, mais à bien faire attention de s'arrêter de danser dès que la musique s'arrête. Mais pris par le plaisir de la danse, il ne suit pas ce conseil, et son ami doit par deux fois le rappeler à l'ordre. La troisième fois, il obtempère à l'injonction. L'étranger lui dit alors qu'il est temps qu'il se mette en chemin pour rentrer chez lui. Avant de partir, il interroge son hôte sur ce qu'il a vu en chemin et s'excuse de sa curiosité et du dommage occasionné. L'étranger lui explique alors que les abeilles sont des âmes proches du salut et qu'il ce n'est pas grave qu'elles se soient envolées. Les vaches grasses sont elles aussi des âmes proches du salut final, et les vaches maigres des âmes qui devront encore longtemps attendre leur libération. Aussi ne trouvera-t-il plus que des vaches maigres sur son chemin.

Arrivé à son village il y voit des gens qu'il ne connaît pas et sa maison est occupée par des étrangers. Il raconte son histoire et essaye de se faire reconnaître, mais en vain. Enfin quelqu'un dit se souvenir d'une histoire qui remonte à trois cents années de là, l'histoire d'un homme parti à une noce et qui n'est jamais revenu. En entendant cela, le jeune marié tombe en poussière et en cendres.
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Crédit Enrico Nawrath

Trois cents ans se sont donc passés dans ce conte où il est beaucoup question de temps, et de rythme, et c'est ce qui a inspiré Klaus Lang pour la composition de sa musique, art éminemment temporel s'il en est. Le temps ("Die Zeit2) fait partie du titre original Der verschundene Hochzeiter. Hochzeit, hohe Zeit, est un temps d'importance de fête, comme le sont les fêtes relieuses les hohe christliche Feste.

La scène de la vieille salle de cinéma bayreuthoise du Reichshof porte un caisson ouvert avec portes latérales et deux fenêtres, une pièce totalement dépouillée. Pas de chanteurs ni d'orchestre sur scène , les musiciens de l'Ensemble Ictus et le superbe Choeur Cantando Admont se sont placés tout autour des spectateurs et sur le balcon arrière du cinéma, constituant comme un cocon sonore qui va bercer l'auditoire pendant les 90 minutes que dure le spectacle, un véritable environnement musical. Pas de chanteurs sur la scène mais deux acteurs danseurs en tous points identiques (ce sont des jumeaux, cela ne s'invente pas, les frères Jirí et Otto Bubeníček. qui vont mimer l'action tout en se mélangeant avec d'extraordinaires hologrammes qui les démultiplient encore. Souvent le corps d'un ou plusieurs hologrammes se confond avec le corps d'un des acteurs au point qu'on ne sait jamais qui est qui et que souvent l'illusion est si parfaite qu'il est difficile de discerner le personnage réel des hologrammes. Les deux frères ont de costumes et des chapeaux à plumes eux aussi identiques, conçus par Pia Janssen, évoquant sans doute le costume de fête des villageois du 17eme siècle autrichien. Un extraordinaire travail de vidéo, créés par Friedrich Zorn, donne l'illusion de la neige qui s'abat à l'intérieur de la pièce sur scène, ou fait défiler les paysages au-delà des deux fenêtres

Le jeune marié et l'étranger sont interprétés par deux chanteurs, la basse Alexander Kiechle et le contre-ténor Terry Wey, qui ne sont jamais présents en scène.

Pendant une heure et demie les spectateurs sont baignés dans une musique à la structure minimaliste, très répétitive, faite d'innombrables percussions la plupart du temps fort douces et coulantes. La musique opère un effet hypnotique avec une ritualisation que l'on retrouve aussi dans les gestes très lents et démultipliés des acteurs sur la scène. Par le truchement de l'hypnose musicale et visuelle le spectateur se trouve comme transporté dans une nacelle flottant sur un fleuve sonore et temporel, comme pris dans les couloirs du temps pour un voyage au cours duquel il ressent les émotions et les mouvements des deux protagonistes, la plupart du temps fort lents, mais aussi avec des déferlements soudains, auxquelles correspondent des défilements très rapides d'images. Un voyage à la fin duquel on se réveille plus détendu, plus souriant, comme apaisé.

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Re: Lang - Der verschwundene Hochzeiter- Ictus/Esterházi- Bayreuth 07-2018

Message par Luc ROGER » 28 juil. 2018, 20:05

Le compositeur Klaus Lang lors de la présentation de son opéra (lumière d'origine dans le hall du cinéma Reichshof / photo personnelle)

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