J.S Bach.Erbarme Dich.R.Van Mechelen. A Nocte Temporis. Rouen Chapelle Corneille16.12.17

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pingpangpong
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J.S Bach.Erbarme Dich.R.Van Mechelen. A Nocte Temporis. Rouen Chapelle Corneille16.12.17

Message par pingpangpong » 17 déc. 2017, 14:30


PROGRAMME
Extraits de Cantates pour ténor et flûte de Bach

Reinoud Van Mechelen ténor
Anna Besson flûte traversière baroque
Benjamin Alard clavecin
Ronan Kernoa violoncelle baroque


Le facétieux Claude Noisette de Crauzat affirmait que, assistant à la messe célébrée par le Pape en personne en la Basilique Saint Pierre de Rome, on ne pouvait que croire, tout agnostique que l'on soit l'instant d'avant, époustouflé que l'on est par les fastes pompeux de la cérémonie, la procession des officiants, cardinaux, évêques, archevêques ou simples enfants de choeurs, alliés à la grandeur écrasante du lieu. Ajoutez à cela la musique, forcément baroque, accompagnant l'office, et le tour est joué, la boutade pertinente.

Et cependant, le dépouillement et le dénuement ne possèdent-il pas aussi le pouvoir de nous rapprocher du Divin lorsqu'ils sont de règle comme en cette mémorable soirée de concert donné par l'Ensemble A Nocte Temporis ?
Bien entendu c'est en une autre Chapelle, plus modeste, celle du Lycée Corneille de Rouen, que se déroule cet instant de ferveur communicative. Et sans nulle cérémonie.
Mais Dieu sait (oui il le sait, le bougre, n'en doutons pas) si la musique de Jean Sébastien Bach se suffit à elle-même, et à notre bonheur; de surcroît lorsqu'elle est servie par des musiciens dont l'humilité n'a d'égal que le talent.

Satan et les tourments de l'Enfer, le péché, l'errance et le doute, contrecarrés par l'espérance en Dieu, en sa miséricorde et en une vie meilleure dans l'Au-delà, sont les thèmes qu'expriment les volutes et escarpements tracés par le Cantor dans les lignes vocales mais aussi celles de la flûte.
Cette flûte qui se fait virtuose, dans les cantates BWV 99 et 130, ce qui n'exclut ni la tendresse ni la légèreté qui n'ont aucun secret pour Anna Besson, laquelle connaît également le texte de son ténor, ses lèvres, lorsqu'elles ne jouent pas, anticipant visiblement les paroles qui suivent. Occasion lui est d'ailleurs donnée de faire montre de son talent, sans ostentation, sur cet instrument chaleureux (copie de Carlo Palanca utilisée pour l'enregistrement correspondant ?) dans les extraits de la sonate BWV 1031 ou de la partita 1013 ; de même pouvons-nous apprécier la délicatesse de jeu de Ronan Kernoa dans les deux premiers numéros de la suite BWV 1007 pour violoncelle seul, tout de sensibilité et de pudeur.
Il est par ailleurs dommage que B.Alard n'aie pas eu l'occasion d'apporter sa contribution soliste à l'équilibre de ce beau programme.

Projetant sa voix sans coup férir, droite, ferme et claire, le ténor Reinoud Van Mechelen aborde différents airs de cantates en empruntant le chemin des écoliers, non selon son bon plaisir qui serait caprice, mais bien “comme un homme qui se cherche“, comme il l'annonce au public après l'aria de la BWV 96.
Faisant allusion au disque, paru en novembre 2016 pour le label Alpha, qui est basé sur le même programme, il prend soin de préciser également que la partie d'orgue n'étant pas envisageable ce soir, c'est le clavecin qui le remplace, “option Café Zimmermann“ en référence au fameux café de Leipzig où Bach avait ses habitudes.
Suit un ensemble d'airs pour ténor accompagnés par la flûte solo, exceptée l'aria “Wenn auch gleich aus der Höllen“ de la cantate BWV 107, où Benjamin Alard au clavecin montre toute son ardeur à déjouer les pièges de Satan.
Tour à tour, l'expression se fait inquiète ou sereine, perdue ou confiante, comme dans “Wo wird in diesem Jammertale“ où le “Wo“ de R.Van Mechelen exprime si bien le désarroi.
Contrôle du souffle et du volume achèvent de captiver l'auditeur.

Le ténor remercie le public de l'avoir accompagné au long de ce parcours fait de tourment et d'espoir avant d'entamer le “Erbarme Dich“ conclusif, qui donne son titre au concert comme au disque, et tiré non de la Saint Matthieu mais bien de la cantate BWV 55 “Ich armer Mensch, ich Sündenknecht“ (Moi, pauvre homme, esclave du péché) d'une touchante simplicité.

Sacrifier au rite du bis semble même totalement superflu dans ce contexte émotionnel, mais avec un extrait de la cantate Pirame et Tisbé, le ténor belge souhaite offrir, au fervent mais trop restreint public de ce soir, un aperçu du prochain cd consacré à Clérambault, avant sa sortie prévue en janvier, enregistrement effectué en compagnie de l'Ensemble qu'il a lui-même fondé, A nocte Temporis.

E.Gibert
Enfin elle avait fini ; nous poussâmes un gros soupir d'applaudissements !
Jules Renard

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