Concert Buxtehude Bach Telemann - Le Palais Royal / Sarcos - 15/03/16
Posté : 17 mars 2016, 11:18
Joie baroque
Dietrich Buxtehude (1637-1707) - Cantate Der Herr ist mit mir, Bux 15
Johann Sebastian Bach (1685-1750) - Cantate Wachet auf, ruft uns die Stimme, BWV 140
Georg Philipp Telemann (1681-1767) - Oratorio Kapitänsmusik 1730 Jauchze, jubilier und singe, TWV 15:5
Laura Holm – soprano
Charlotte Mercier – mezzo
Mathias Vidal – ténor
Aimery Lefèvre – baryton
Le Palais royal
Florence Malgoire, violon solo
Jean-Philippe Sarcos – direction musicale
Salle historique du premier Conservatoire – 15 mars 2016.
Joie tranquille, attente confiante. C’est de ces couleurs émotionnelles que Buxtehude et Bach ont trempé leurs cantates : le premier se fonde sur un psaume pascal, le second sur le célébrissime Cantique des Cantiques et sur le dialogue des époux. Si le narrateur principal, le chœur, semblait manquer d’assurance en tout début de soirée, il s’est épanouit peu à peu pour délivrer des commentaires savoureux et pertinents, en contrepoint des échanges du Christ et de l’âme, annoncé par un séduisant Mathias Vidal : Laura Holm, éperdue de tendresse répondait à un Aimery Lefèvre impérieux, pour la délectation de l’auditoire, sur un magnifique continuo où la douceur répliquait à l’énergie des cordes et aux susurrements des bois.
Après cette délicieuse mise en bouche, le concert culminait en seconde partie de soirée avec une partition superbe qu’on entend encore trop peu : une pièce extraite des Hamburgische Kapitänsmusik de Telemann. Cet oratorio allégorique composé pour le banquet annuel des capitaines de la garde d’Hambourg est l’un des dix qui ont survécus sur les 36 composés. Celui de 1730 célébrait à la fois le centième banquet des capitaines et le bicentenaire de la Confession d’Augsbourg. Le colloque contradictoire entre la Joie et la Tristesse, ainsi que les interventions du Temps, de la Vérité et de la Gratitude prennent ainsi leur place dans les grands débats théologiques mis en musique à l’époque baroque, non sans allusions directes à cette actualité immédiate. Actualité qui fait parfois étrangement écho à nos temps troublés et reflètent l’éternel questionnement des hommes. La fluidité de la cantate de Telemann donne cependant une fausse allure de badinage ludique à cette interrogation métaphysique sur la destinée humaine, sans en distraire la profondeur.
Ce charme délectable était incarné avec ardeur par Laura Holm, Joie lumineuse et primesautière, que ne parvenait pas à troubler un Aimery Lefèvre monolithique en Tristesse compassée. Elle était confortée par Mathias Vidal, Temps serein et suavement éclatant, par une Gratitude triomphante dans l’allégresse de ses vocalises (Aimery Lefèvre, qui contrastait habilement par d’autres couleurs ses deux personnages si dissemblables) et par Charlotte Mercier, Vérité encore un peu acide. Se glissant avec aisance, pétillement ludique (pour les esprits joyeux) ou grisaille atone (pour les esprits tristes), le chœur trouvait également des teintes et des dynamiques -– qui lui faisaient parfois défaut dans la cantate de Buxtehude – pour faire triompher la foi et l’espérance sur l’entropie.
Sous la baguette d’un Jean-Philippe Sarcos qui dispense généreusement son enthousiasme, Le Palais Royal, transporté par le violon chaud et éloquent de Florence Malgoire, entraîne solistes et chœur dans un cheminement où la beauté du son est le manifeste de cette ferveur partagée.
Emmanuelle Pesqué
Photographies © Georges Berenfeld YouriB
Dietrich Buxtehude (1637-1707) - Cantate Der Herr ist mit mir, Bux 15
Johann Sebastian Bach (1685-1750) - Cantate Wachet auf, ruft uns die Stimme, BWV 140
Georg Philipp Telemann (1681-1767) - Oratorio Kapitänsmusik 1730 Jauchze, jubilier und singe, TWV 15:5
Laura Holm – soprano
Charlotte Mercier – mezzo
Mathias Vidal – ténor
Aimery Lefèvre – baryton
Le Palais royal
Florence Malgoire, violon solo
Jean-Philippe Sarcos – direction musicale
Salle historique du premier Conservatoire – 15 mars 2016.
Joie tranquille, attente confiante. C’est de ces couleurs émotionnelles que Buxtehude et Bach ont trempé leurs cantates : le premier se fonde sur un psaume pascal, le second sur le célébrissime Cantique des Cantiques et sur le dialogue des époux. Si le narrateur principal, le chœur, semblait manquer d’assurance en tout début de soirée, il s’est épanouit peu à peu pour délivrer des commentaires savoureux et pertinents, en contrepoint des échanges du Christ et de l’âme, annoncé par un séduisant Mathias Vidal : Laura Holm, éperdue de tendresse répondait à un Aimery Lefèvre impérieux, pour la délectation de l’auditoire, sur un magnifique continuo où la douceur répliquait à l’énergie des cordes et aux susurrements des bois.
Après cette délicieuse mise en bouche, le concert culminait en seconde partie de soirée avec une partition superbe qu’on entend encore trop peu : une pièce extraite des Hamburgische Kapitänsmusik de Telemann. Cet oratorio allégorique composé pour le banquet annuel des capitaines de la garde d’Hambourg est l’un des dix qui ont survécus sur les 36 composés. Celui de 1730 célébrait à la fois le centième banquet des capitaines et le bicentenaire de la Confession d’Augsbourg. Le colloque contradictoire entre la Joie et la Tristesse, ainsi que les interventions du Temps, de la Vérité et de la Gratitude prennent ainsi leur place dans les grands débats théologiques mis en musique à l’époque baroque, non sans allusions directes à cette actualité immédiate. Actualité qui fait parfois étrangement écho à nos temps troublés et reflètent l’éternel questionnement des hommes. La fluidité de la cantate de Telemann donne cependant une fausse allure de badinage ludique à cette interrogation métaphysique sur la destinée humaine, sans en distraire la profondeur.
Ce charme délectable était incarné avec ardeur par Laura Holm, Joie lumineuse et primesautière, que ne parvenait pas à troubler un Aimery Lefèvre monolithique en Tristesse compassée. Elle était confortée par Mathias Vidal, Temps serein et suavement éclatant, par une Gratitude triomphante dans l’allégresse de ses vocalises (Aimery Lefèvre, qui contrastait habilement par d’autres couleurs ses deux personnages si dissemblables) et par Charlotte Mercier, Vérité encore un peu acide. Se glissant avec aisance, pétillement ludique (pour les esprits joyeux) ou grisaille atone (pour les esprits tristes), le chœur trouvait également des teintes et des dynamiques -– qui lui faisaient parfois défaut dans la cantate de Buxtehude – pour faire triompher la foi et l’espérance sur l’entropie.
Sous la baguette d’un Jean-Philippe Sarcos qui dispense généreusement son enthousiasme, Le Palais Royal, transporté par le violon chaud et éloquent de Florence Malgoire, entraîne solistes et chœur dans un cheminement où la beauté du son est le manifeste de cette ferveur partagée.
Emmanuelle Pesqué
Photographies © Georges Berenfeld YouriB