DVD ALCESTE de GLUCK / CHATELET

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Lionel
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DVD ALCESTE de GLUCK / CHATELET

Message par Lionel » 27 août 2004, 19:33

Je viens de voir L'alceste par Gardiner avec Anne sophie von Otter et Paul Groves.

Mon avis est plutôt négatif. Je ne connais pas très bien Glück. Je n'ai qu'Orphée et encore je ne l'ai écouté que très peu de fois.

Concernant les voix et les musiciens, je les ai trouvé bons.

Quant à la musique, au traitement du sujet et à la mise en scène ça m'a été beaucoup plus difficile.

La musique me parait ennuyeuse et ressemble à un vrai mélodrame. Il y a très peu d'airs vraiment chantés. Dans la forme ça m'a parut ressembler à Pélléas et Mélisande que j'avais vu au théatre de Compiègne. Peut être c'est le style de l'Opéra français ? En tout cas je trouve ça sans grand intérêt.
L'ouverture est très bien par contre et quelques passages semblent appeler une certaine beauté. Mais tout cela est bien saccadé et je n'ai pas entrevu de grande unité dans l'enchainement des numéros.
Est ce que c'est caractéristique de Glück ou bien j'ai mal perçu l'oeuvre ?

En outre, le traitement du sujet est vraiment bancale et pas crédible.
Je connais l'Alceste d'Euripide et l'action ne se déroule pas du tout comme ça. Chez Euripide, après le refus du don de leur vie par ses propres parents, Admète accepte "lâchement" et orgueilleusement le sacrifice de sa femme. Puis une fois partie, il se rend compte de l'impossibilité d'une telle séparation. En faisant voeu de veuvage éternel, il se languit de cette perte inestimable lorsque Heraclès arrivé en hôte pendant les cérémonies funèbres lui ramène Alceste des enfers.

Chez Glück, Après avoir appris l'oracle permettant de sauver Admète, Alceste agit seule, en se lamantant sur son sort dans son coin, sur quoi tout le peuple exulte dès qu'il sait Admète sauvé. Lui même ne contient plus sa joie et ne s'enquiert même pas de savoir qui s'est sacrifié à sa place. Puis devant le visage déconfit de sa femme, il crie ses grands Dieux qu'il ne veut pas d'une telle substitution comme si on lui privait la gloire de cette mort.
Il faut l'intervention des dieux infernaux pour régler la dispute.
On nous sort la morale d'un amour sans borne prêt à tous les sacrifices mais ça sonne bien creux. Puis intervient inopinément Hercule qui heureusement pour son "pote" va tout faire pour que cela ne se produise pas. La conclusion se fait très rapidement avec une petite intervention moralisante d'Apollon et hop "ils vécurent heureux et eurent de nombreux enfants".

La mise en scène et le jeu des personnages sont effroyables. Tout est d'un sombre, d'une lenteur, d'une statique qui ferait tomber de sommeil les plus enthousiastes. Le décor est toujours bleu sombre sauf à de très rares moments un peu blanc mais cette soudaine luminosité est sans rapport avec l'action. Les comédiens sont à la mode pseudo égyptienne, et tout le monde se meut de manière saccadée les articulations toujours tendues et fixes, les mains plates. Si bien que quand un personnage lève le bras on a l'impression qu'il nous fait le salut nazi. Des danseurs gesticulent et tourbillonnent par moment à faire tourner la tête plutôt qu'à apporter une certaine grâce. On dirait des mouches qui virevoltent autour d'un dépôt nauséabont et on a la nausée. Certains côtés sont carrément ridicules, comme ces gestes mécaniques prompts lors des derniers accords de l'orchestre. Pire les gesticulations d'Hercule qui en mimant son combat dans les enferts donne plus l'impression de chasser les mouches et le risque de se faire emmener à l'asile. Le texte est trop riche pour une mise en scène si plate et statique ce qui fait que le poème a l'air d'être pompeux et emphatique. "L'affreux" séjour, le sacrifice "terrible", tous ses adjectifs sonnent bien creux, tout comme l'amour immense d'un Admète qui pour le prouver se contente de tendre le bras vers sa dulcinée à 5 mètres de distance à s'en disloquer les articulations.
Tout cela se passe devant un fond sur lequel circule un cube qui tournoit dans les airs surement pour satisfaire les élucubrations géométriques du metteur en scène.

Enfin, si vous avez aimé, expliquez moi, j'ai peut être loupé quelque chose...
Je voudrai savoir plus précisément comment se présente le travail de Glück au niveau de la théatralité (morale, présentation des mythes) et au niveau de la musique (forme, fond...)

Merci

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Message par tuano » 27 août 2004, 23:21

Ce spectacle est passé sur France 3 il y a quelques jours !

J'avais vu le spectacle a Châtelet et je n'avais pas tellement aimé, alors je n'ai pas trop suivi la restransmission télé.

Je crois que Robert Wilson a réussi à mettre superbement en valeur les aspects les plus ennuyeux de l'oeuvre. Il paraît aller dans le sens de la musique mais fait certainement le contraire de ce qu'il faut. C'est de la paraphrase qui plombe complètement le spectacle.

Cela manque un peu de grandes voix aussi. Anne Sofie von Otter passe mieux à la télé qu'en vrai mais ce n'est pas très excitant.

PS : C'est "Gluck" sans accent ! :wink:

PPS : Alceste sera donné à Salzbourg l'été prochain, en version de concert.

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Message par olaf » 28 août 2004, 16:49

:D Bonjour, nouveau venu sur ce forum
J'ai assisté à la reprise de ce spectacle en Janvier 2004 à Bruxelles au TRM avec I.Bolton à la direction, et une distribution différente de Paris d'où se distinguait le magistral Kurt Streit , j'ai aussi le DVD de la production du Chatelet.
Sur l'oeuvre, mon enthousiasme est mesuré, je trouve la musique magnifique, le talent dramatique de Gluck est une merveille. Cependant le texte et l'histoire tout cela sonne "ringard" à nos oreilles, difficile de ne pas sourire devant certains effets du livret. La mise en scène dans tout cela et bien j'ai adoré. La langue scénique de Robert Wilson est formidable, son travail est d'une poésie magnifique (les danseurs ou ce cube formidable symbole du temps qui s'écoule). L'ironie est tout aussi présente dans ce spectacle au moment de l'incroyable arrivée d'Hercule. Wilson a certainement compris qu'il était impossible de prendre au pied de la lettre le livret et il sait s'en jouer. Un magnifique spectacle mais bon je suis un fan de Robert Wilson donc mon avis est peut être influencé
PS : j'ai offert ce DVD à une amie pour lui faire découvrir le travail de Wilson, elle a beaucoup aimé

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Message par Lionel » 29 août 2004, 13:27

Pour ma part je ne pense pas que le livret soit anachronique. Tout le monde peut apprécier Racine encore aujourd'hui et aussi Homère.

J'ai l'impression que c'est la mise en scène figée et impersonnelle qui fait que le lyrisme exacerbé du livret parait ridicule. Dans un autre contexte, les douleurs des protagonistes auraient été transfigurées et la monotonie de l'oeuvre passant ainsi inaperçue.

Je ne crois pas non plus que le cube représente le temps qui passe, mais plutôt la fatalité du destin, la volonté inexorable des Dieux.
Mais bon, comme tout ce qui est abstrait, l'interprétation est libre.

Enfin, je ne comprends pas pourquoi un metteur en scène ne prend pas au pied de la lettre un livret. Il faut se fier au mythe, on est dans un autre monde, pourquoi y apporter du rationalisme ? A ce compte là, l'apparation d'Apollon est toute aussi ridicule.

Je ne connais pas d'autre oeuvre mise en scène par Wilson. Pouvez vous me suggerer quelque chose de représentatif. Je pourrai me faire une idée de son approche du théatre.

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