Voyage au cœur du baroque d’Amérique latine

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JdeB
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Voyage au cœur du baroque d’Amérique latine

Message par JdeB » 12 déc. 2011, 16:45

PACQUIER, Alain, Le Retour des caravelles. Voyage au cœur du baroque d’Amérique latine, Paris, Fayard, 2011, 329p.

Alain Pacquier, fondateur des festivals de Saintes et de Sarrebourg, du label discographique K. 617, celui qui confia sa première mise en scène d’opéra baroque à Jean-Marie Villégier, raconte ici, à l’aide de ses souvenirs et de nombreux témoignages, une épopée culturelle de 25 ans, celles des Chemins du Baroque. Ce sauvetage du patrimoine musical de l’Amérique latine, trésor oublié par ses héritiers eux-mêmes, a bénéficié à 15 pays différents, aux 400 jeunes musiciens formés et aux 11 orgues historiques sauvés tandis que les 57 disques enregistrés, vendus à 600 000 exemplaires au total, ont permis de faire rayonner ces musiques retrouvées dans le monde entier. Comme le formule de manière fort pertinente Dolores Beistegui, directrice de cabinet de l’ancien ministre de la culture du Mexique: «la grande valeur ajoutée des Chemins du Baroque était d’avoir su nous proposer une vision du continent (…) il fallait quelqu’un qui vienne de l’étranger avec une vision globale de ce que l’Europe, l’Espagne et le Portugal ont apporté à ce continent ».

Ce livre débordant d’enthousiasme, de couleurs, d’humanité, fourmille de moments irrésistibles. Celui des Bajunes, cet instrument fabriqué à partir de feuilles de palmes roulées, qui, s’étant desséchés, sont restés muets pendant le repas de presse du festival et qu’il a fallu pulvériser sans cesse de bière lors du concert présidentiel aux Invalides auquel, finalement, François Mitterrand n’a pu assister. Cette recréation le 2 mai 1998 par Gabriel Garrido du San Ignacio, ce fameux opéra jésuite perdu qui avait été restitué par musicologue argentin Bernard Ilari, avec l’arrivée inopinée dans l’église juste avant le concert des trois plus beaux jeunes gens du village surmontées de grandes coiffes à plume, ceux qui sont désignés chaque année pour représenter le diable et les mauvais anges.

On y croise des personnes tout à fait singulières comme Lorenzo Calzavarini, un ami d’Umberto Eco et de Fiorenza Cossotto, le supérieur du couvent franciscain de Tarija qui essaye d’initier nos « baroqueux » aux beautés de La Fanciulla del West de Puccini, ou Hans Hertl, le correspondant de guerre de l’Afrika Korps, un ancien amant de Leni Riefenstahl et dont la fille fut la maîtresse de…Che Guevara. On y admire l’attitude de Claudio Abbado à Cuba et on se passionne pour l’histoire du Requiem de Mozart version de « Rio de Janeiro » exhumé et enregistré par Jean-Claude Malgoire.

On y découvre « ce que fut l’impact de l’irradiation européenne à un certain moment au contact de populations neuves » selon la belle formule du cinéaste Alain Corneau, un grand soutien de ce projet, et la réappropriation de leur patrimoine culturel par tant de peuples assoiffés de leur culture revivifiée.

Jérôme Pesqué
Parution de ma biographie "Régine Crespin, La vie et le chant d'une femme" ! Extraits sur https://reginecrespinbiographie.blogspot.com/
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